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ses tablettes, et, quoiqu'il fût l'Amphitrion, implorait l'in-
dulgence de l'auditoire. Alors il lisait le Gryphus, pièce dans
laquelle sont réunis tous les objets qui renferment le nom-
bre trois, comme les Parques, les Grâces, etc., et celte liste
n'avait pas moins de quatre vingt-douze vers : et les convi-
ves d'applaudir avec enihousiasme ; et l'auteur de demander
en souriant qu'on veuille bien excuser une énumération si incom-
plèle(l). Oubien ildonnait lecture du technopcegnion^aulre tour
de force du même genre, dans lequel chaque vers finit par
un monosyllabe qui se retrouve encore au commencement
du vers suivant. Et tout le monde trouvait cela admirable,
et les jeunes convives pensaient qu'on était bien heureux
d'être si grand poète, et Ausone lui-même croyait peut-être
entendre ce jugement de la critique populaire : Courage, Au-
sone, c'est là de la bonne poésie.


                                 IX.

INFLUENCE DES GENS DE LETTRES SUR LE TALENT D ' A D S O N E .   POÉSIE
                 DIDACTIQUE.     POÉSIE DESCRIPTIVE.



   Les facultés de l'intelligence sont à peu près les mêmes
dans tous les siècles ; elles ne diffèrent que par l'application :
c'est une sève qui devient indifféremment ou racine ou feuilla-
ge, selon qu'elle se porte sous la terre ou dans l'air. Ces
rhéteurs que fréquentait Ausone étaient pour la plupart des
hommes pleins d'esprit. Il fallait user à quelque chose cette
surabondance d'activité. La stérilité nécessaire de la pensée
dut les jeter dans Ja recherche de l'expression; comme au
défaut de son esprit un fat soigne sa parure. C'est donc dans
l'art d'ajuster les mots qu'ils mettent tout le mérite, toute la
gloire de l'écrivain : c'est là qu'ils cherchent à se surpasser

  (1) Idy. 3, inprœfat.