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   Nous ne prétendons point caractériser Beethoven en quel-
ques lignes hâtives; ce que nous avons dit suffira pour faire
sentir combien il est difficile d'écouter et d'exécuter les œu-
vres de cet esprit immortel. L'auditeur doit d'abord détruire
dans son souvenir tout ce qui pourrait y rester des refrains
connus, des coupes usuelles de la musique; il doit songer qu'il
va converser avec un demi-dieu, et qu'il est inutile de lui prê-
ter ses oreilles si elles ne sont préalablement disposées à
transmettre au cœur et à la tête les messages qu'elles recevront;
il doit donc repasser dans sa mémoire les plus grandes idées
qui ont préoccupé sa vie, les plus grandes passions qui l'ont
agitée, les plus grandes épreuves qui l'ont fécondée. Chacun
a dans son existence un point mystérieux par lequel il a tou-
ché à l'infini; c'est par ce point là qu'il faut communiquer
avec Beethoven si on veut saisir l'enchaînement de ses idées
et le sens de ses Å“uvres.
   L'artiste doit, ce me semble, se pénétrer de la même ma-
nière des sentiments et des pensées du divin génie qu'il veut
traduire. Lorsqu'il arrive à l'exécution, sa tâche devient, sans
contredit, plus difficile encore ; il fant qu'il sache prodiguer
tous les trésors du maître avec cette fermeté, cette sérénité,cette
délicatesse quisontensembleles attributs de la véritable gran-
deur. Beethoven n'épuise ni ses idées ni ses images ; dès qu'il
les a produites il a hâte de dépenser de nouvelles richesses, et
sa volonté trouve sur le champ des transitions qui, en un clin
d'œil, vous font faire le chemin des chevaux d'Homère. Il
faut donc que l'instrument, destiné à rendre ces mélodies, les
exprime avec la plénitude qui convient à leur puissance, avec
la rapidité qui convient a leur abondance, avec cette préci-
sion sans laquelle les transitions et le dessin lui-même de-
meurent inintelligibles.
    L'orchestre qui a exécuté à "Lyon la symphonie en re et
 la symphonie enw( mineur, était plus nombreux que celui du