Pour une meilleure navigation sur le site, activez javascript.
page suivante »
                                       48
qui veut décrire avec la plume, n'est pas plus raisonnable que
le peintre qui voudrait raconter avec le pinceau.

                                        X.
                                LA MOSELLE.

  La Moselle d'Àusone a toutes les qualités, tous les défauts
des poèmes descriptifs. Plusieurs des morceaux qui compo-
sent celte idylle, pris séparément, sont de charmants ta-
bleaux. Nous avons parlé plus haut des jeux des Naïades et
des Faunes. Cette esquisse a d'autant plus de mérite, qu'Au-
sone n'y est point tombé dans sa faute ordinaire. Il n'a point
surchargé de détails ces légères images. Au lieu d'accumuler, il
a choisi; et son choix a été si heureux que je ne crains pas de
rapprocher ce passage d'une strophe charmante du Tasse,
dont le sujet est semblable :
          Scherzando sen van per l'acqua chiara
          Due donzellette garrule et lascive,
          Ch'or si spruzzauo il volto, or fanno a gara
          Chi prima a un segno destinato arrive ;
          Si tuffano allora : è'1 capo è' 1 dorso
          Scoprono alfîn dopo il celato corso (i).

Quelle que soit la grâce de cette peinture, les jeux des Naïades
d'Ausone ont quelque chose de plus piquant :
          Tune insultantes sua per fréta ludere nymphas,
          Et satyros mersare vadis : rudibusque nalandi
          Per médias exire manus, dum Iubrica falsi
          Membra petuut, liquidosque fovent pro corpore fluctus (2).

   (1) « S'en vont jouant par l'onde claire deux fillettes au doux babil, à la
folâtre allure, qui, tantôt se jettent de l'eau au visage, tantôt font un défi
à qui arrivera la première à un but marqué. Elles plongent alors, et, après
avoir caché leur course, elles découvrent enfin leur tête et leurs épaules. »
   (2) « Alors, dit-on, les nymphes bondissent, en se jouant dans leur