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484 et invariables, une foule d'autres lois exclusivement pro-> près aux temps, aux lieux, aux différents modes, aux dif- férents degrés du développement intellectuel et moral de l'humanité ; la législation littéraire d'un peuple ou d'une époque ne saurait donc toujours être celle d'un autre peuple, d'une autre époque. Or, nous sommes séparés d'Athènes et de Rome, moins encore par la distance des siècles que par la distance in- commensurable des idées. Entre les anciens et nous, il y a une révolution la plus radicale, la plus complète qui fut jamais, le christianisme. C'est comme ua monde tout nouveau que la main créatrice a surperposé à un autre monde. Nous, hommes du dix-neuvième siècle, que nous sommes loin d'envisager Dieu, la vie, l'homme, le monde comme les envisageaient le siècle de Périclès et le siècle d'Auguste ! Dieu, c'était pour la masse des croyants l'idéal de Fhom- me, l'Apollon du Belvédère, le Jupiter Olympien ; c'était pour les plus hautes intelligences, le Dieu du panthéisme physiologique, l'ame du monde enchaînée au grand corps de l'univers comme l'ame de l'homme à ses organes.— Dieu, c^est pour nous l'être éternel, immense, souve- rainement indépendant des liens de la matière, l'être qui d'un mot a créé le monde et le gouverne avec une sa- gesse, une bonté, un amour infinis. La vie, c'était pour eux un banquet où chaque convive devait s'empresser de jouir, de boire à longs traits dans la coupe des plaisirs, l'heure approchant où leur ame al- lait descendre chétive et nue dans le sombre empire des Mânes. — La vie, c'est pour nous le pénible et court noviciat d'une existence infinie en bonheur et en durée j c'est l'enjeu de l'éternité.