page suivante »
36 Guindrand a toujours ce sentiment profond de l'espace, des gran- des lignes, des vastes horizons que vous lui connaissez. La Vue prise sur les bords de la Seine se compose d'un morceau de terre où pous- sent quelques joncs, d'une grande nappe d'eau, d'une autre grande- ligne fermant la perspective là où n'est pas l'onde, voilà tout! et voilà un tableau fait, ayant de l'intérêt et de la vie ; c'est un peu miraculeux, vous l'avouerez. Cependant cela est loin de valoir la belle Plage d'Ostende d'autrefois , dont ce n'est qu'une seconde édition un peu décolorée. Les Bords de la rivière d'Ain présentent de beaux effets; à droite du spectateur surtout, la colline, la prairie où paît un troupeau, le ciel sur ce point, tout cela est admirable. Les montagnes mornes et plates de la Bresse, sans contours saillants, placées uniformément les unes à côté des autres, ne doivent guères prêter au pittoresque ; cependant Guindrand, avec sa compréhen- sion prodigieuse do l'harmonie des lignes, en a tiré grand parti. Le bouquet d'arbres au milieu est une vieille connaissance, et ce no sera pas peut-être la dernière fois que nous aurons le plaisir de le voir; n'importe, il est des importuns aimables auxquels on ne fait pas mauvais accueil. Je préfère les Bords de la Loire, surtout tels que nous les a re- présentés ce peintre, à tous les autres bords. J'ai parcouru ceux delà Loire, et, en plusieurs endroits, je les ai trouvés plats et mo- notones; mais ceux qui portent le n° 184 sont ravissants. Quel fond! la lumière se répand partout et dore admirablement le site; les ter- rains en pente tournent et descendent. On serait cependant bien aise de trouver dans les premiers plans quelque chose d'un peu net et d'un peu arrêté. M. Guindrand esquive trop souvent ces détails; si les de- vants de ces tableaux étaient ordinairement plus consciencieux, les fonds qu'il si comprend bien n'en ressortiraient que davantage. Cet artiste possède trop d'intelligence et de talent pour qu'on doive rien lui cacher. Pourquoi no marche-t-il pas aussi vite dans sa route que son organisation semblait le faire présumer?... Peut-être sa grande facilité s'oppose-t-elle au développement complet de son ta- lent. Il produit trop vile et pense trop à l'acheteur. Les Côtes du Bretagne nous offrent un ciel magnifiquement tri-