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215 aucune pour la pensée du tableau qu'il représente, car il n'y a pas de pensée il n'y a rien que l'imagination puisse saisir. Bien différente de la nôtre , la danse espagnole , toujours voluptueuse comme une Andalouse, semble réveiller en nous quelque doux rêve delà jeunesse. Ce n'est pas la légèreté, c'est la grâce ; ce n'est pas un sylphe, c'est l'amour. On n'y ren- contre pas cette agilité vive, aérienne, brillante , quoiqu'un peu saccadée , sèche et aride de la danse française, mais on y trouve ce charme qui subjugue, cette langueur qui magnétise, cette passion qui sans dire : je veux vaincre, vous force d'a- vouer qu'on est vaincu. L'une est Junon ; l'autre est Vénus. La danse de nos théâtres parle à l'esprit, la danse espagnole eni- vre l'ame ; la première, dans un rond de jambe, s'adresse en courtisane aux sens émoussésdu parterre, la seconde vous en- toure de caresses , de séductions et vous fait tomber , en vous enlaçant, sur les fleurs qu'elle effeuille. L'une se prostitue plu- tôt qu'elle ne séduit, l'autre séduit sans se prostituer; puis, lorsquelle a séduit, elle se donne. Avant M. Camprubi et MIIe Dolores Serai peu de personnes à Lyon avaient une idée vraie de la danse espagnole, bien que depuis quelques années on l'ait intercalée dans un grand nom- bre de ballets. Cette ignorance s'explique facilement si l'on considère qu'il est de ces choses qui appartiennent aux peuples et qui ne s'imitent pas , de ces cachets dont on ne peut saisir exactement l'empreinte, de même qu'on ne prend jamais par- faitement l'accent d'une langue étrangère, quelque soitl'élude qu'on en ait faite.Il y a donc chez les danseurs espagnols, quelque chose de voluptueux , que jamais nos sylphides fran- çaises ne nous rendront avec une illusion complète , et M"= Fany Elsller elle-même ne danse pas la cachucha comme SP° Dolores. Mais il y a encore autre chose qu'on n'atteint pas en copiant, c'est le naturel qu'on cherche à imiter, et qui ne vaut jamais celui qu'on a. Les danseurs du premier théâtre de Madrid sont surtout remarquables parce qu'ils sont toujours eux, et consé-