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    Passe, flétri, dans ta mémoire,
Ne sens-tu pas tes yeux de larmes se remplir?,>,

Moi je suis triste aussi, je fais de tristes songes...
Toujours un souvenir, à travers leurs mensonges,
M'apporte, en longs regrets, mon bonheur effacé,
Et je sens qu'à mon front il s'imprime une ride,
      Chaque fois que mon Å“il humide
Jette un sombre regard dans la nuit du passé.

N'est-ce pas qu'il était pur et brillant, mon frère,
L'astre qui nous versait sa féconde lumière,
Alors que dans les airs se croisaient nos cerceaux ,
Et que nos cris joyeux effrayaient l'hirondelle?
      N'est-ce pas qu'elle semblait belle
L'étoile qui devait protéger nos berceaux ?

Rhône, fleuve géant, dont les îles riantes
Sont autant d'oasis sur tes eaux chatoyantes,
Tes bords, où nos poumons s'élargissaient au vent,
Où ton flot imposant toujours passe et repasse,
     Qu'ont-ils fait, dis-moi, de la trace
De nos folâtres pieds sur ton sable mouvant ?




Heures d'épanchement, d'ivresse et d'espérance,
Qui coulâtes si vite au toit de notre enfance,
Quand des parents aimés, sur nos fronts, tour à tour,
Jetaient de longs baisers, de suaves caresses,
      Et façonnaient en blondes tresses
Nos cheveux que leurs doigts lissaient avec amour ?

Longues nuits de l'hiver, bavardes et dormeuses,
Qui gardiez au chevet nos tètes paresseuses,
Jusqu'à ce qu'un jour plein argentàt les volets,
Nuits, d'héroïques plans et de gloire semées,
     Où nous rêvions combats, armées,
Et couronnes de roi, magiques feux-follets ?