Pour une meilleure navigation sur le site, activez javascript.
page suivante »
                               391
frances et les grandes péripéties de l'épopée de l'avenir. L'an-
tiquité dans les mythes qu'elle enfanta eut surtout en vue
 l'origine des choses; sa grande préoccupation, c'était la nais-
sance du monde et l'âge d'or écoulé; nous, au c o n t r a i r e ,
nous rêvons d'un âge d'or futur ; il est donc naturel que nos
poètes en créant des symboles y renferment tout ce que Dieu
leur a donné d'esprit prophétique.
    M. Quinet se sert des événements et des hommes, mais ce
 n'est point en vue d'eux-mêmes, pour ce qu'ils peuvent avoir
 de dramatique ou de grandiose ; il ne se fait pas, comme les
 poètes narratifs, l'interprète soumis des faits ; il impose aux
 faits sa pensée et son intention divinatoire. Voilà ce qui le
 sépare des écrivains qui ont fait du drame et du récit histo-
 rique comme aussi de ceux qui, avec la prétention d'engendrer
des poèmes philosophiques, ont répudié de leurs écrits toute
 image et toute action. Il s'occupe peu de la création des ca-
 ractères individuels et de la réalité dramatique, ce sont des
 idées qu'il met en scène, et des idées qui se développent non
pas dans un cœur mais dans la conscience universelle; son
héros, ce n'est ni Napoléon, ni Prométhée, ni Ahasvérus, c'est
le genre humain; et son sujet, c'est la destinée du monde. Pla-
cé à ce point de vue, il a sa manière spéciale de comprendre
la nature extérieure ; comme tous les poètes, il admire en
elle l'enveloppe transparente du inonde moral, il écoute avec
amour les voix secrètes des éléments, il étudie les instincts
de la terre indiqués dans la physionomie des lieux -, mais, tan-
dis que les autres poètes se pénètrent des harmonies du monde
physique avecl'ame isolée, lui s'occupe surtout des rapports
de la création avec le génie des peuples et la grande a m e d e
l'humanité. Il vous dira quelle idée et quelle nation a germé
dans chaque vallée^ sur quel sol est éclos un Dieu, sur quelle
terre il a été transplanté pour fleurir, sur quelle autre il achè-
vera sa glorieuse transfiguration.
   Le style du poèleréfléchitson amour du symbole et son intel-
ligence de la figure; de même que ses conceptions générales se