Revue du Lyonnais » série 1 - n°9 ( 1839 ) » pp.296

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s'identifie beaucoup mieux avec une situation, avec un carac-
tère, aussi George Sand l'emporte-t-elle dans toutes ces qua-
lités, non seulement sur les autres romanciers, mais sur son
sexe tout entier, surtout dans l'expression. La femme seule
sait comprendre et adoucir les douleurs de l'homme, George
Sand fait p l u s , elle se les assimile^ elle en fait sa propre sub-
stance^ et elle les exhale enfin en paroles de feu, vivaces et ra-
pides, qui entraînent malgré soi celui qui les entend.
     Maintenant s i , sous ces formes riches et brillantes, à travers
ces mille récits pleins de verve et d'intérêt, sous cette poésie
étincelanle de lumière elde coloris , on cherche une idée-mère,
une pensée génératrice ; si, à travers les détours et les sinuosi-
tés que cette belle imagination se plaît à parcourir; si, dans les
nombreux replis de ses investigations poétiques, onveuldécou-
vrir la direction véritable de sa course qu'elle cache peut-être
au lecteur ; en un mot, si on veut voir dans l'horizon sans li-
mites où elle se meut, le but unique qu'elle a déterminé d'a-
vance ; si l'on cherche dans ses Å“uvres un principe fixe, un sys-
tème arrêté, tous les efforts son l in utiles et restent sans résultat.
En vain le dernier livre que vous venez de lire vous indique»
t-il une tendance , le livre suivant vient bientôt déjouer votre
perspicacité. Chaque page des ouvrages de George Sand est
un sarcasme, non contre l'opinion du lecteur, mais contre celle
des pages précédentes de l'auteur; et l'on peut dire d'elle-
m ê m e ce qu'elle a dit d'un de nos grands orateurs, qu'elle est
un des rois de la parole. Quant à la pensée, c'est différent ;
elle lui a échappé , car George Sand a fait comme bien d'au-
t r e s , son intelligence n'est pas allée se prosterner devant elle
à sa source.
  C'est que la pensée, ou la parole à l'état de repos, relève di-
rectement de Dieu, comme la parole proprement dite , ou la
pensée en m o u v e m e n t , relève indirectement de l'homme.
L'honime, ou le genre h u m a i n , n'a été créé par Dieu que pour
qu'il ren'dît un hommage intelligent au Yerbe , créateur tout-
puissant. La parole n'a été communiquée à la créature que