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   repas de table d'hôte, que le public est admis à entendre quelques
  accords harmonieux, ou quelque solo exécuté à la hâte , dans la
  crainte que le bruit des cloches de Saint-Pierre, ou celui des four-
  chettes ne l'étouffé avant le final.
     C'est vraiment traiter la musique en bohémienne errante que de
  lui refuser un temple où elle puisse habiter on propriétaire, et non
  en solliciteuse passagère et importune.
     Quelle humiliation, au milieu de la prospérité industrielle de notre
  ville, de ne pas trouver deux ou trois cents mille francs, à consacrer à
  cette institution, après avoir jeté les millions à pleines mains pour
  notre salle de spectacle ! Comment se fait-il, qu'au milieu de tous les
  legs et donations que les remords ou les regrets arrachent à quelques
  voyageurs d'ici-bas, il ne s'en trouve aucun pour la musique. Au
  moment de prendre ses passeports pour l'éternité, comment se fait-
 il que pas un de nos fanatiques amateurs n'ait encore songé à don-
  ner à sa fortune une aussi morale direction ? Est-il cependant un
 art qui intéresse aujourd'hui les masses à un plus haut degré, et qui
 soit un des plus grands auxiliaires de la civilisation, et même de la
 religion dont il est un des propagateurs les plus puissants. Nos
 grands compositeurs ne sont-ils pas des demi-dieux auxquels on
 rend le culte qu'a su leur mériter l'élévation de leur génie ! Tous
 les jours n'avons-nous pas des souscriptions pour ériger des statues
 aux illustres guerriers, aux savants, aux grands hommes, honneur
 do notre patrie ! Elevons donc aussi un temple où l'on puisse exé-
 cuter les œuvres admirables do ces grands prêtres de la musique, et
 que leurs chants sublimes fassent taire toutes les passions et toutes
les ambitions qui agitent le cœur humain, et qu'ils y fassent naître
 des pensées plus calmes et plus consolantes pour l'humanité.
     L'existence du théâtre n'est-elle pas elle-même intimement liée à
l'organisation musicale du peuple ? Où est la pépinière dans laquelle
 vous puiserez vos chanteurs, vos musiciens, vos choristes si vous
n'avez aucune école, aucune institution pour les former dès leur
jeunesse, et les façonner à toutes les exigences de la scène ? C'est,
sans contredit, à ce dénuement d'institutions musicales, que vous
devez attribuer la rareté de vos premiers sujets et la nécessité de
rétribuer, aussi chèrement que des ministres ou des ambassadeurs,