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50 vrai, et ternies en vingt endroits); mais, quand je demande qu'on jette sur mon lit une cousinière pour me garantir des cousins qui m'empêchent de dormir, le valet de chambre qui sourit d'un air de satisfaction intérieure et me répond, avec toute la hauteur lyonnaise, qu'on ne tient point de telles choses à l'hôtel, et que personne n'en a jamais demandé. Tout ce luxe faux , tonte cette civilisation manquant son but, me serre le cœur à force de petitesse et de bêtise inoffensives. Il me semble assister à une discussion de la chambre de Hol- lande sur les chemins de fer ou sur les douanes. À chaque fois que j'ai été reçu, à la descente de la voiture, par M. C***, cousin de mon beau-père (c'est absolument la phy- sionomie de Barème, et de Barème mécontent, parce qu'il vient de faire une perle de 20,000 fr.), il fallait voir comme ce cher cousin lyonnais se précipitait au devant de moi, et m'était la parole au moment où je disais à un homme de la poste de prendre ma valise et de la porter chez lui. Il avait peur de me voir payer trop cher ce petit service. — Et pour cela vous aurez la pièce de douze sous, disait-il à l'homme avec une inquiétude marquée. Sa physionomie de- venait plus acariâtre; l'homme réclamait et lui disait presque des insolences , etc. J'avouerai ma faiblesse ; dès cet instant, mon cœur devenait incapable de goûter aucun plaisir à Lyon, et je n'aspirais qu'au bonheur d'en sortir. M. C*** m'a dit de prime abord aujourd'hui que les lois somp- tuaires qui, depuis 1830 , ont interdit aux Tunissiens tout le luxe dans leurs vêtemens, ont porté un coup fatal à son com- merce. Et là dessus il a fait une mine incroyable. M. C*** est un homme fort estimable, fort excellent père de famille, payant bien ses impositions ; mais , grand Dieu, quelle phy- sionomie! Ainsi que les négociants, ses collègues, il emploie des ouvriers tisseurs en soie qui travaillent chacun dans sa chambre, et qu'on appelle canus. Moi j'étends ce nom aux négociants eux-mêmes. Tout ce que le petit commerce, qui exige surtout de la patience, une attention continue aux dé-