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                                  Ai
    Maintenant, mon cher gentilhomme, ma tâche est finie; vous
 voyez qu'en résultat le salon ne possède aucune œuvre bien remar-
 quable, rien de capital enfin, comme le Dante de notre Flandrin, par
exemple ! Est-ce donc que vos prophéties commenceraient à se réa-
liser? est-ce que la discorde qui s'est glissée dans la commission
executive de la Société des Amis des Arts serait le précurseur si-
nistre de la ruine de cette institution? Toutes ces questions sont
trop délicates pour que je les aborde ici, et il me faudrait d'ailleurs
plus de place qu'il ne m'en reste. On pourrait seulement se deman-
der si ces hommes qui doivent être éclairés dans leur route par le
flambeau de l'intelligence et soutenus par l'amour bien entendu de
l'art, remplissent suffisamment leur mission, et s'ils sont réellement»
comme ils devraient l'être, les protecteurs de l'art et surtout de
Vart lyonnais.
   Adieu, mon cher gentilhomme ! si vous avez trouvé dans vos
courses un coin de terre où le soleil luise et où l'on aime sincère-
ment et pour elles la poésie, la musique ou la peinture, ces trois
manifestations du beau, ces reflets du ciel que tout homme porte en
son cœur, écrivez moi vite, et nous y dresserons nos tentes.

                                                  JOSEPH   A....
  Lyon, i l janvier 1839.



    P. S. — Depuis ma dernière lettre, l'Exposition a reçu de nou-
veaux tableaux qui, à des titres différents, méritent que je vous en
parle. Le Bussy d'Amboise sortant de chez la dame de Montsoreau
prouve que je ne me trompais pas quand je vous disais que M. R.
Laurasse comprend bien ce qui est sentiment et passion. Il est fâ-
cheux que ce jeune peintre ne joigne pas aux qualités du coloriste
celles du trait et de la composition. La poitrine et les épaules de
son Bussy manquent d'ampleur et de largeur. Son regard ne va pas
jusqu'à la femme aimée qu'il salue d'un dernier adieu ; il s'arrête à
sa main. Les trois personnages qui composent ce tableau nous sem-
 blent beaucoup trop éloignés les uns des autres ; on aurait pu les