Pour une meilleure navigation sur le site, activez javascript.
page suivante »
                                       368
  Dans cette déplorable occasion, le poète Gacon mit le comble
à toutes les bassesses auxquelles il n'avait pas rougi de descen-
dre. Voici le dégoûtant rondeau qu'il n'eut pas honte de mettre
au jour :
                                   RONDEAU.
                    Vu l'écriteau mis en place de Grève
                    Par maître Charle , aidé de son élève ( t ) ,
                    Contre Rousseau, successeur de Villon (2),
                    J'en ai requis un acte tout au long
                    Pour l'annoncer à tout descendant d'Eve.
                    Aux habitans d'où le soleil se lève
                    Jusques à ceux où sa course s'achève,
                    J'affirme avoir de ce rimeur félon
                                 Vu l'écriteau.
                    Lé tableau porte , en parole brrève,
                    Reaucoup de honte et peine peu griève :
                    Sans la faveur de messer Apollon,
                    Il eut fendu le liquide sillon ;
                    Mais mieux n'en est, car de dépit il crève
                                  Vu l'écriteau.

«  justement condamné, Rousseau ne le fut pas à tort. Il se peut cependant qu'il
«  ne soit pas l'auteur des couplets, qu'il puisse même les attribuer à Saurin ;
«  qu'est-ce que cela fait au jugement qui ne porte que sur la subordination de
«  témoin ? »
   Il faut convenir que voilà une admirable logique et surtout une belle justice.
   (1) Le bourreau de Paris n'était plus André Sanson; mais Charles son fils. De-
puis Louis XIV, la famille Sanson est en possession, de père en fils, des fonctions
d'exécuteur des hautes œuvres.
    (2) François Villon, poète ordurier et voleur de profession, né à Paris sous le
règne de Charles VII, était encore vivant à la fin du quinzième siècle. Inven-
teur, dit-on, de l'argot des filous, condamné à être pendu, après avoir été plu-
sieurs fois repris de justice . Il fut assez heureux pour obtenir la commutation de
cette peine en celle du bannissement. N'ayant rien fait pour vaincre ses inclina-
tion vicieuses, il se fit encore arrêter dans le fond de la Bretagne où il était
exilé, et il subissait depuis quelques années , dans la prison de Meun-sur-Loire,
la peine d'une détention rigoureuse, lorsque Louis XI, sur quelques poésies ba-
dines qu'il lui adressa, ordonna sa mise en liberté. N'est-ce pas encore une
infamie de la part de Gacon , de mettre Rousseau en parallèle avec un homme
 de cette espèce ?