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Christ : Crois ou meurs! Dans ce temps on se mit à crier : fJégalilé
ou la mort! On matérialisa la formule par l'instrument du sup-
plice, hideux et fidèle s y m b o l e , procédant par voie de retran-
chement pour arriver à un niveau, argument ad hominem contre
tous ceux que la naissance ou la fortune rendaient trop grands.
    Mais l'instrument eut beau faucher, son tranchant s'est émoussé
contre l'indestructibilité des faiblesses humaines. Que le monde
se renouvelle ^ la somme de ses vices et de ses vertus reste à
peu près la même ; ce qu'il gagne d'un côté, il le perd d'un autre ;
et quelque soit la transformation qu'on décore du nom de so-
ciabilité., quelque soit ce qu'on appelle le progrès de celle-ci,
l'homme reste toujours l ' h o m m e , avec ses passions et ses be-
soins à satisfaire.
    Ainsi en fait l'égalité ne saurait être qu'un m e n s o n g e , un p a -
r a d o x e , comme tant d'autres rêveries enfantées par le désir du
bien chez l'homme ardent et spéculatif. L'inégalité ne se révè-
le-t-elle point en toute chose avec les relations d'une loi générale
et absolue? Qu'on me présente deux hommes ayant mêmes nerfs,
même vigueur, même cerveau , même a p p é t i t , mêmes besoins,
mêmes sensations, même intelligence; entre Rossini et l'Her-
cule du n o r d , entre Cuvier et l'homme de la h a l l e , entre le
fashionable et le paysan, la femme du boudoir et la harengère ,
n'y aurait-il pas inégalité complète , différence de race ? Pom-
ma part je ne puis croire que tous les hommes sont pétris du
même limon , qu'ils obéissent aux mêmes nécessités, qu'ils aient
droit aux mêmes prérogatives.
    Aussi je ne m'étonne plus que chaque homme veuille marquer
sa p l a c e , constater la différence juste ou injuste, absurde ou
légitime qui le sépare d'un autre homme ; après cela qu'il le
fasse suivant des moyens plus ou moins ridicules , par des dis-
tinctions plus ou moins puériles, cela tient à sa nature plus ou
moins élevée, aux mœurs de son t e m p s , aux traditions que le
passé lègue à l'avenir.
    Puis toutes les individualités se réunissent, se g r o u p p e n t ,
s'accouplent par similitude , par analogie, par profession ; elles
forment des catégories, des classes. A Lyon celles-ci se parta-
gent en quatre grandes catégories : la noblesse, le commerce,