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sur sa surface une triple couche de r u i n e s , traces authentiques
de trois grandes révolutions humaines : le druidisme avec les
Celtes, le paganisme avec les Romains, le christianisme avec
les Francs.
    Là ce sont des blocs énormes auxquels les traditions du pays
 donnent une mystérieuse origine, et que de notre temps ils
 nomment encore les pierres des Fées. Il y a plus de deux mille
 ans , autour de ces autels d'une religieuse simplicité, les Druides
rassemblaient les Celtes errans dans les forêts pour leur dicter
 de sages lois. C'est donc là que vient se rattacher le premier an-
 neau de la chaîne sociale. Ici ce sont des temples , des palais
renversés, des idoles, des a r m e s , des colonnes brisées et mille
reliques éparses de cet empire romain, dont le colosse en tom-
bant couvrit la terre des lambeaux de son cadavre. Ce sont aussi
 les vestiges de ces voies romaines dont les longs sillons restent
toujours empreints au front de ces montagnes, où elles portaient
jadis la civilisation et l'esclavage, comme de profondes cicatrices
du glaive des César. Enfin ce sont des manoirs féodaux dont les
donjons abandonnés et les gothiques tourelles, ne servent plus
de retraite qu'aux oiseaux de proie ; des églises, des chapelles
encore d e b o u t , mais dont un culte plus p u r , dont une parole
vraiment évangélique, chasseront tôt ou tard les superstitions
ultramontaines, comme Jésus chassa les marchands du temple
de Jérusalem.
   Alors l'imagination exaltée exhume sans ordre tous nos sou-
venirs selon son fantasque caprice. Chacun des coins de ce
tableau s'anime de son existence passée , chacune de ces ruines
se pare de sa splendeur d'autrefois.
   Entendez-vous ces clameurs, là-bas, non loin de ce camp au-
tour duquel fourmillent les soldats romains : c'est Ruessium,
la cité des Yélauniens; le saint Paulien d'aujourd'hui, le misé-
rable village a disparu. Y oyez le château d'Espaly sur le rocher
qui domine ia vallée de ce n o m , dessiner mélancoliquement
ses crénaux sur ce jour ménagé entre deux noires collines. Des
pages, des chevaliers v o n t , viennent, s'empressent; les châte-
laines des environs se hâtent d'accourir, et dans tout ce mou-