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   Tous les visages firent aussitôt face au mien. •— A votre gau-
che , notre m a î t r e , là-bas sur la rive droite du Rhône. C'est l'expo-
sition la plus chaude du Valais. — Exposition chaude tant que
vous voudrez; mais elle n o u r r i t , à ce qu'il p a r a î t , une variété
d'ermites qui n'en rend pas le voisinage fort sain, quand on a des
vergers surtout, et qu'il leur prend envie de manger du fruit.'—
Oui, o u i , répondit Coutet, c'est un pays rempli de crétins ; et
c'est bien désagréable à v o i r . — P a r b l e u , mon cher, c'est la
moindre des choses, vos crétins , ce n'est pas un crétin qui a
mangé Guillaume Mona p e u t - ê t r e ! — T o u t e la société qui avait
suivi de l'Å“il l'indication de Coutet, se retourna une seconde fois.
    Coutet n'y était plus ; il me regardait fixement et ne répondait
pas. —Qu'est-ce donc que ce Guillaume Mona, et qui diable l'a
m a n g é , s'écria le peintre?^—Comment;, répondis-je , vous êtes
artiste, vous courez les Alpes et vous n'avez pas lu les Impres-
sions de voyages d'Alexandre Dumas? — De M. Dumas, l'auteur
d'Antony et de la Tour de Nesle, reprit timidement l'abbé? — Pré-
cisément.—En ce cas, le livre doit être bien écrit mais peu m o r a l ,
r e p r i t - il plus timidement encore.— Oh! pour celui-là, M. l ' a b b é ,
je vous le garantis, sans incestes et sans le plus petit adultère.
•—Lecielen soit loué, exclama l'artiste, et notre cher Dumas aussi!
Véritablement, ça commençait par devenir abusif; voyez-vous ,
en fait de crimes, de quelque bonne qualité qu'ils soient, c'est
comme en fait de sagesse , assez en faut, pas trop n'en faut; c'est
du moins mon avis. —'Oh! Barbier le rude poète a mille fois rai-
son , interrompit à son tour le père de la jolie française :

           C'en est fait aujourd'hui de la beauté de l'art !
           Car l'immoralité levant uu œil hagard ,
           Se montre hardiment dans les jeux populaires ;
           Les théâtres partout sont d'infâmes repaires,
           Des autels de débauche , où le vice éhonté
           Donne pour tous les prix, leçon d'impureté.
           C'est à qui, chaque soir, sur leurs planches banales
           Etalera le plus de honte et de scandales,
           A qui déroulera'dans un roman piteux
           Des plus grossières mœurs les traits les plus honteux,
           Et sans respect aucun , pour la femme et pour l'âge ,
           Fera monter le plus de rougeur au visage.