Pour une meilleure navigation sur le site, activez javascript.
page suivante »
                                  98
avez une pensée à v o u s , si vous avez en vous un souvenir qui
ne soit pas effacé pour un i n s t a n t , une idée qui ne vous ait pas
fui, un rêve qui ne vous ait pas abandonné,, vous n'êtes pas
poète! non, vous n'êtes pas poète! Le poète est altéré, il est écrasé
sous ces proportions sibien modelées; à peine a-t-il la force d'ad-
mirer ce style si simple et si v r a i , qui ne se torture pas pour
se faire c o m p r e n d r e , et qui dit tant de choses que l'âme ne
peut les retenir. Ou s'il admire, il y aura dans son extase du dé-
sespoir, désespoir bien légitime; c a r , p o è t e , artiste, vous qui
êtes nés au siècle où tout a r t , toute connaissance, a tant fait de
progrès, vous irez voir la poésie d'autrefois, et vous vous écrie-
rez hors de vous : Oh ! le p a s s é , le passé est beau !...
    La façade n'a point d'ordre spécial d'architecture. Le frontis-
pice est couronné par trois faces qui s'élancent en triangles , et
qui sont ornées de découpures arabesques et de niches dans le
style gothique. De gracieux piédestaux avec des bases au contour
a r r o n d i , des chiffres enlacés, des feuillages à travers lesquels
passe le jour, des bouquets unis par des liens symétriquement
faits, sont multipliés avec grande prodigalité, et montrent dans
le travail une admirable délicatesse. Les trois cents ans qui ont
passé devant le frontispice de cette église , siècles entiers mêlés
d'orages politiques et de sanglante anarchie, ont apporté quel-
ques dégradations à ces si molles et si naïves figures qui le dé-
corent. Au-dessus du grand portail est une galerie en claire-voie,
surmontée de vitraux qui donnent jour à l'église. De chaque côté
du fronton du milieu s'élèveut deux colonnes avec bases et cha-
pitaux , surmontées de deux lions assis _ portant les armes de
                                                 ,
Bourgogne. — Jusqu'ici ce n'est rien : l'extérieur ne peut que
vous faire présager des beautés ; mais il ne vous présentera rien
de comparable à celles que vous révélera le sanctuaire. Entrez
dans l'église , une étrange adniiration s'empare de vous; la sain-
teté du lieu , l'antiquité du monument que vous visitez, v o u s ,
enfant d'un jour et qui êtes écrasé par cet immense témoin des
temps écoulés -, la blancheur et l'éclat de cette pierre que les
années et les générations qui se sont entassées dans cette en-
ceinte n'ont pu ternir de leur souffle destructeur ; la clarté du
jour qui se reflète sur les silencieuses statues, et qui se colore