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EN OISANS 205 bloc de neige tombe, faisant après lui une traînée blanche et tourbillonnante. Le bloc, déjà gros de plusieurs centaines de mètres cubes augmente encore de volume dans son effroyable chute qui de l'endroit où nous sommes nous paraît tout à fait • perpen- diculaire : nous étions juste en face, éloignés environ de 1200 mètres. Au crépitement de la fusillade s'ajoutent des coups de canon, tellement bruyants que nous ne nous entendons plus parler. L'avalanche bondit sur le Glacier Noir, à la base de la montée du col de Coste-Rouge; elle se brise en un fracas étourdissant, les débris s'éparpillent au loin, un brouillard épais s'élève en nuages blanchâtres qui se bousculent dans l'air, nous cachant complètement la montagne, et long- temps les échos nous renvoient la canonnade peu à peu assourdie. Puis tout retombe dans le silence. Seule, l'eau qui coule près de nous continue de sa voix grêle sa chanson argentine. Un quart d'heure après, le brouillard flottait encore dans le bas s'abaissant lentement. Nous traversons le Glacier Noir : de nouvelles avalanches se succèdent pendant une heure toutes les deux ou trois minutes. Quelquefois nous en voyons plusieurs en même temps. Mais aucune n'est aussi belle, aussi bruyante, que la première, celle qui tombait de l'Ailefroide ! Sur la pointe des Écrins le vent soulève la neige en une colonne de fumée que le soleil rend éblouissante, et nous songeons à ces volcans des Cordillères dont les cratères sont des glaciers : Les nombreux trous et aspérités de la glace sont recou- verts de neige récente; à chaque pas nous glissons, et rou- lons sur les genoux ou sur le dos. On se relève pour