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                           M. DÉSIRÉ GIRARDON                l8l

    Car c'était bien là la situation en 1857.
    Pour les professions libérales, toutes les voies étaient
aplanies : les programmes de tous les établissements d'en-
seignement secondaire y convergeaient naturellement, et,
au sortir de l'enseignement secondaire, les Facultés de
droit, les Facultés de médecine, les hautes Écoles du gou-
vernement présentaient en face leurs portes engageantes.
   Tout conspirait, au contraire, contre le commerce et
l'industrie. Les programmes de l'enseignement secondaire
ne tenaient aucun compte de leurs exigences. Et il n'y avait,
en dehors de l'École Centrale des Arts et Manufactures
et de l'École Turgot, à Paris, aucune école spéciale pour
remplacer ou compléter cet enseignement. Les jeunes gens
qui voulaient embrasser les professions industrielles ou
commerciales, auxquelles rien cependant ne les avait pré-
parés, étaient réduits à ne faire qu'un saut du collège au
magasin ou à l'usine, et à attendre leur complément d'édu-
cation seulement de la pratique. Ressource détestable, car
la pratique à elle seule ne donne pas d'idées générales,
n'ouvre pas l'esprit, n'élargit pas l'horizon ; elle est parti-
culière, égoïste et incomplète ; elle manque de méthode,
elle a d'énormes lacunes et des superfluités envahissantes.
   Cette situation n'était pas nouvelle : la question de l'or-
ganisation de l'enseignement professionnel avait été nette-
ment posée soixante ans auparavant par la Convention ;
tous les gouvernements l'avaient agitée à leur tour; la
Constitution de 1848 la formulait en termes précis. Mais
tout cela n'avait pas fait faire un pas à la difficulté. L'ensei-
gnement professionnel n'existait pas en France.
   On comprend dès lors le mot de M. Arlès-Dufour :
 « Faites-nous une Martinière pour nos fils », c'est-à-dire,
« créez-nous ce qui nous manque et dont nous avons
      N° 3, — Mars 1892.                                I?