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136 EN ÔISANS vous devez contourner extérieurement sur un rebord étroit : soudain le rebord cesse, il est remplacé par une saillie en creux, par une fissure qui coupe horizontalement la paroi et dont l'ouverture doit être large de cinquante centimètres environ, autant que je me rappelle. La longueur de ce mauvais pas est peut-être de six ou huit mètres, mais du point de départ on ne peut apercevoir l'autre, extrémité, car le rocher tourne à l'ouest dans la direction de la Brèche de la Meije. Au-dessous... le vide. ... Gaspard passe le premier, puis mon frère, puis Turc... Je ne saurais dire comment ils firent. Quand ils ont disparu, je m'engage à mon tour, mais la fissure me semble trop étroite pour que je puisse ramper entre les deux rebords ; alors je reste dans une station verticale, et me tenant avec les bras sur le rebord inférieur, j'avance insensiblement en plaçant mes pieds sur des saillies micros- copiques. Les bras font ainsi tout le travail, et en franchissant ce passage, il me revient à l'esprit une vieille réminiscence de gymnastique de collège qui pourrait donner une idée de la chose: C'est le souvenir de ce fameux tour qu'on intitulait pompeusement la marche du lion et qu'on exécutait sur un reck ou sur une barre de suspension, en allant d'un bout à l'autre de la barre par des rétablissements successifs sur les poignets. Finalement nous passâmes. De suite au bout de la corniche, il y a une dalle très raide à gravir, sur la crête de laquelle on peut se mettre à cheval, et tout en reprenant son souffle admirer le coup d'œil invraisemblable que l'on a en dessous sur la Brèche de la Meije.