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                       LE BOUQUET FATAL,                        249

   Cette exclamation contenait toute les stupéfactions d'un hom-
me qui est à cent lieues de la révélation qu'il reçoit. Elle sem-
blait dire: Comment! toi, un sage, un homme rangé, un phé-
nomène de douceur, un antipode de spadassin, tu te bats ?
   — Oui, repondit Remy, et j'ai compté sur toi pour être mon
témoin.
   — Tope là, tu as eu raison. Ton choix me donne la mesure
de l'estime et de l'amitié où tu ma tiens, et je t'en remercie. Je
suis à toi.
   — J'en étais sûr. On ne convie à ces corvées que ceux, qui
vous tiennent de près par le cœur.
   — Mais, reprit Cartier, il te faut un second témoin.
    — Et Brassard ?
   — C'est juste. Voici l'heure où il déjeune à sa pension. Allons
le relancer.
    Et ils se mirent en marche.
    — Voyons, continua Cartier. Ce duel est-il sérieux ? N'y a-t-il
aucun moyen de l'empêcher?
   — Aucun. L'inj ire que j'ai reçue s'adressait aussi à une
morte dont je dois venger la mémoire.
   Et sur ces mots, Remy confia à sonami le mystère de sa vie,
ignoré jusqu'alors de tous.
   Quand ce récit fut achevé, Cartier poussa un gros soupir et
répliqua d'une voix attendrie et bourrue : Allons , tu as mille
fois raison, il n'y a pas à reculer, à moins que le muscadin ne (e
fasse des excuses.
   A ce froment ils touchaient la maison de la rue Michodière où
l'ami Brossard prenait ses repas avec ses camarades de régi-
 ment. 11 quittait ia table et s'acheminait au café voisin.
    Le capita ne Brossard était un bel et énergique officier qui
avait été le compagnon d'armes de Dorbray l'aîné et qui avait
même reçu son dernier soupir en Afrique.
    Par un jeu bizarre de la destinée, il allait peut-être rendre le
même service à Remy, pour lequel il éprouvait une vive et tendre
 affection, en ressouvenir de celle qui l'avait uni à son frère.
    Après avoir été mis rapidement au courant de la situation, il