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              LETTRES D'HIPPOLYTE FLANDRIK                 6l

n'est plus aussi pressant, je m'empresse de vous le dire, ils
vont mieux, beaucoup mieux ; et le résultat a été amené
par un désolant repos de quatre mois (!), une certaine eau
et des lunettes bleues, Maintenant j'ai pu me remettre au
travail, et, continuant de garder quelques ménagements,
ça va de mieux en mieux. L'inquiétude irritante et chagrine
qui me tourmentait a disparu et je devrais seulement
penser à remercier Dieu de m'en avoir ôté le sujet; mais
non, il faut toujours se plaindre de quelque chose.

   Maintenant, je ne puis m'empêcher de regarder en
arrière et de regretter cette demi-année perdue. Oh !
quand je vois le peu que j'ai fait depuis que je suis ici, 1.1
venue de M. Ingres me fait peur. Je viens de lire à l'instant
sa nomination dans le journal, et j'ai peine à analyser l'im-
pression que j'en recois, mais je crois que la peine l'em-
porte sur le plaisir. Je regretterai toute ma vie les chefs-
d'œuvre que je vois échapper à la France. Cette grande
peinture, cette peinture monumentale, qui allait si bien à son
génie, il ne trouvera plus ni le temps ni l'occasion de la
faire. Au moins si, pour compensation, il trouvait ce repos
qu'il cherche ; mais pour cela, venir se mettre à la tête
d'une administration, c'est un mauvais moyen. Il est vrai
qu'il va retrouver Rome et toutes ces belles choses qui
l'ont nourri et fortifié; peut-être que ce sera assez pour lui
rendre courage. Oh ! je le désire bien. Si je pouvais con-
tribuer à lui éviter quelques peines, à lui rendre son séjour
ici plus tranquille, avec quel plaisir je le ferais ! Enfin,
espérons.

  Pourquoi n'êtes-vous pas de ceux qui viendront avec
lui? O h ! je serais heureux, mais pour le moment n'y
pensons pas. Je sens comme vous combien les choses que