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 3 l8             LAURENT MEILLET DE MONTESSUY

auprès de Monsieur le Dauphin, qui est le roi a présent
régnant (Louis XIII) ; aucuns de bonne maison y furent
introduits, et tant de ceux-là, que de ceux de chez le Roy,
pages de la Chambre et autres, ils pouvayent estre environ
soixante-dix, ou quatre-vingts ; mais la grande despence en
dégoutta bientôt les plus ambitieux, car hors ceux qui por-
taient la casaque, ou livrée, qui estoyent au dépens de Sa
Majesté, tout le reste suivait la Cour à ses propres frais, qui
n'estayent pas si petits que deux jeunes frères, gentilshommes
issus d'une des grandes maisons du Poictou, n'y employassent
six mille escus d'or (20), et lorsqu'on voulut régler le train
de celuy que j'avais l'honneur de gouverner qui estait leur
cousin, on trouva par juste supputation que par aucun
mesnage, ny chicheté d'espargne, il ne se pouvait entretenir
à la Cour selon son rang à moins de seze cents escus d'or
par an, ainsi que je feray voir par estât certain que j'ay en
main. »
   Cet « estât certain » n'est pas parvenu jusqu'à nous, il
nous eut probablement donné de curieux détails.
   Cependant, Laurent Meillet ne fit pas mauvaise figure à
la Cour ; tout d'abord son emploi ne lui permit que d'être
observateur, et il ne s'en priva pas. S'étant fait plus tard recon-
naître de quelques seigneurs bressans, comme un compa-
triote, il en reçut le meilleur accueil. Le rang de son élève
y fut peut-être pour quelque chose, Henri de Saulx était
petit-fils d'un maréchal de France et, par sa mère, petit-fils


  (20) La valeur intrinsèque de l'écu d'or, sous Louis XIII, se peut
évaluer à environ douze francs de notre monnaie, soit done 19,000 francs
pour seize cents écus d'or, et 72,000 francs pour six mille. Quant à la
valeur relative, fort difficile à évaluer, elle était peut-être, par suite des
exigences du luxe de la Cour, inférieure à la valeur intrinsèque.