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12      LE CENTENAIRE DE L'ASSEMBLEE DE VIZILLE

   Mais alors une émotion très vive gagna la population
tout entière ; il semblait que cet exil du Parlement allait
être la ruine de la cité. Ce fut un deuil général ; toutes les
boutiques furent fermées, des attroupements se formèrent.
Les différents corps de la ville vinrent successivement chez
le premier président, M. de Bérulle, pour lui témoigner leur
 douleur et leurs angoisses.
  Bientôt la foule s'amasse autour de l'hôtel de M. de
Bérulle, qui allait partir pour la campagne : « Qu'il ne
« parte pas, s'écrie-t-on, et qu'aucun de la Compagnie ne
« s'éloigne, sans quoi la ville est perdue ! »
   Tous les quartiers de Grenoble retentissent bientôt du
même cri, qui, mille fois répété, devient le mot d'ordre
général. En vain M. de Bérulle et ses collègues s'efforcent-ils
de s'opposer à ce mouvement insurrectionnel ; on veut les
rendre factieux malgré eux ; on va chercher les voitures de
chacun et on les enferme dans la cour de l'hôtel du Pre-
mier Président. Pour plus de sûreté, on courut aux portes
de la ville, ces portes furent en un instant fermées, les
herses baissées, de sorte que personne ne put sortir de l'en-
ceinte des murs.
   Des patrouilles trop faibles pour réprimer l'émeute qui
grondait partout et grossissait toujours, furent bientôt mal-
menées et maltraitées. L'une d'elles frappa d'un coup de
baïonnette un vieillard sans défense. A la vue du sang qui
coulait, la foule devint furieuse, elle dépava les rues, esca-
lada les toits, fit pleuvoir sur les troupes d'abord une grêle
de cailloux, puis les lourdes tuiles creuses qui couvraient
les maisons ; un officier du régiment de Royal-Marine ayant
 ordonné une charge de mousqueterie pour défendre la vie
 de quatre hommes qu'il commandait, tua ou blessa plu-
 sieurs personnes, ce qui porta au comble la colère du