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248 LES ALFS DANS LE NORD nom d'Obéron et ce triste et déplorable Hellequin, son frère ! S'il a cessé d'être l'astre triomphateur de la mort et des ténèbres, Obéron joue du moins un assez beau rôle dans l'empire prestigieux de la féerie ; il en est l'empereur et le roi. « Obéron le fayé ou faé » — « Obéron, roi de féerie,» tels sont ses titres. A Fenvi, légendes,romans, bal- lades, poésies lui accordent, avec un extérieur séduisant et une humeur joyeuse, un pouvoir sans bornes sur ses sujets, les Alfs, les Sylphes et les fées gentilles. Même, si méritent créance Ben-Jonson, Shakespeare, Wiéland, et tous les imitateurs de Huon de Bordeaux, un curieux roman du cycle d'Artus (1), Obéron est l'enfant gâté de la création. Dans sa forme aérienne, il n'a rien à envier aux Péris de la Perse, aux Apsaras de l'Inde. De même que ces génies de félicité, il jouit d'une beauté pérenne, ressent une joie inal- térable et parcourt un cycle d'existence illimitée. Un pareil bonheur, s'il n'était partagé, deviendrait à la longue insup- portable. Obéron a donc pris femme : son épouse est l'attrayante Titania, autrement Titen, que de très doctes auteurs disent n'être autre que Phébè, la blanche protec- trice des vierges et des amours chastes (2). Ces époux for- tunés s'aiment et s'aimeront toujours avec une tendresse égale, et comme ils régnent en même temps qu'ils s'aiment, un sceptre est dans leurs mains. Obéron fait le sien d'une branche de verveine ou d'un rameau d'églan- tier ; Titania, elle, se contente d'un lis nouvellement éclos : (1) Huon de Bordeaux, édit. de Gucssard et Grandmaison, Paris, Franck, 1860. (2) En gr. TirijuiV, en latin Titania, sont les noms patronymiques de Diane ou Phébé.