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                         DEUX AMITIÉS                         I4I

à l'oreille de la jeune fille, elle n'oubliait pas les promesses
qui lui avaient été faites. Quant à Mme Dermont, elle sem-
blait avoir entièrement oublié ce point important. Elle pa-
raissait jouir d'une position très aisée ; d'ailleurs l'élégance
suprême dont elle était environnée, son mépris pour les
questions d'argent, rendaient difficile et même douloureuse
à Marie la nécessité de lui rappeler ces promesses.
   Bien souvent, tandis que M rae Dermont la couvrait de ca-
resses, l'appelait sa jeune, son aimable amie, le cœur de la
pauvre enfant battait du désir et de la crainte à la fois de lui
parler enfin de la réalisation de cet espoir qui soutenait sa
mère et elle-même ; hélas ! la parole expirait sur ses lèvres ;
elle craignait d'être taxée d'orgueil, de paraître attacher trop
d'importance à ce qui en avait peu sans doute aux yeux
d'autrui, et chaque jour, honteuse de sa faiblesse, elle ré-
pondait au regard interrogateur de sa mère en baissant la
tête.
   Mme Dermont s'aperçut enfin des distractions et du trou-
ble de la jeune fille et lui en demanda la cause. C'était là
une occasion de s'expliquer que Marie ne laissa pas échap-
per. Mme Dermont l'écouta sérieusement et lui répondit :
   -— Cher oiseau des bois, vos vers sont charmants, il est
vrai, mais ils ne me paraissent pas assez parfaits pour les
livrer à la publicité. Il faut travailler à en faire d'autres sous
ma direction et je vous promets le succès. Maintenant, ve-
nez m'embrasser et je vous apprendrai une grande nouvelle
qui vous fera plaisir, je pense. C'est que je vais passer ici
tout l'hiver. Eh ! chère mignonne, c'est vous qui êtes la
cause de cette détermination.
   Ne serai-je pas mieux ici avec vous, à l'abri de votre
amitié, que dans Paris où j'ai souffert, où l'on m'a mécon-
nue, dont enfin, mon meilleur ami est absent encore. Vous
me chanterez, bel oiseau, vous me garantirez de la froidure