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UN ENFANT DE CHOEUR. 475
Elle souleva la main du dormeur qui était plus près d'elle,
il fit un mouvemenl, mais sans s'éveiller; sa tête se releva,
et son chapeau glissa à terre, rendant la liberté aux longues
boucles de ses cheveux qui tombèrent a flots sur ses épaules.
Ce ne fut pas sans admiration que la dame contempla les
traits suaves, les purs contours de cette physionomie enfan-
tine, qui s'épanouissait dans le sommeil. C'eût été cruauté
de l'en tirer. Après avoir mis deux pièces d'or dans sa main,
qui se referma instinctivement, la dame allait s'éloigner,
quand un des chevaux, impatient du signal du départ, se
mit a hennir fortement. Les oreilles de l'enfant furent si
désagréablement affectées de ce cri discordant, qu'il s'é-
veilla en sursaut; l'éclat de la torche l'éblouit un moment,
sa main s'ouvrit, et l'or retentit en roulant sur la pierre.
C'était comme un rêve des Mille et une Nuits. Mais il fut
bientôt ramené à la réalité. Il réveilla sa petite compagne,
et les deux enfants interdits et craintifs, restaient debout,
attendant que la belle dame les interrogeât. Jeannette se
tenait un peu en arrière, ouvrant tout grands ses yeux
bleus les plus beaux du monde, tandis que le vent faisait
voltiger sur son cou les tresses d'or de sa chevelure.
— Vous avez la un lit bien froid, mes petits amis, leur
dit-elle. Voulez-vous entrer chez le maître de poste? je le
prierai de vous recevoir près du feu.
— Veux-tu aller te chauffer chez le maître de poste,
Jeannette, dit l'enfant en se tournant vers la petite fille?
Mais celle-ci, sans répondre, se rapprocha de son compa-
gnon, et saisit son habit, tout en continuant à fixer sur la
dame ses grands yeux étonnés.
— Je vous remercie, Madame, reprit-il, il est près de cinq
heures, et l'on va ouvrir l'église ; il faut que je sois présent
pour chanter au chœur, et vous voyez que Jeannette ne
veut, pas me quitter.