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                           SAINT PAUL A LYON.                             315
un méchant manuscrit du temps d'Henri IV où il est dit que saint Paul,
pendant son séjour, à Lyon, fonda l'abbaye de Saint-Pierre, dont il aurait
dédié lui-même l'Eglise sous le vocable de son compagnon dans l'apostolat.
De telles assertions ne souffrent pas de discussion : c'est d'une absurdité qui
dépasse toute mesure. Ce sont pourtant de semblables preuves que M. Pe-
ladan n'hésite pas à alléguer et à commenter ; ses autres autorités ne sont
pas toutes de la même force, mais elles se bornent néanmoins à des écri-
vains du XVII e siècle. Voilà des témoins qui avaient un don de vue rétros-
pective fort développé, pour affirmer des faits passés depuis 1600 ans; un
spirite ne verrait rien là que de très-croyable, mais la critique historique
ne s'accommode pas de ces merveilleuses,autorités. La Semtiine religieuse
allègue ailleurs une prétendue tradition qui subsisterait dans un'certain quar-
tier de Lyon. Comme Lyonnais, comme ayant vécu dans le quartier dont
il s'agit et connaissant les traditions locales, je nie catégoriquement ce fait
qui du reste ne prouverait rien par lui-même.
   Au surplus, deux anachronismes servent de base à ces faux systèmes his-
toriques. On lit ainsi dans la Semaine religieuse (n° 3, p. 40) : « La déli-
« vrance de saint Paul eut lieu en 63, et il s'écoula huit années entre sa dé-
« livrance et son martyre. C'est pendant ce temps qu'il réalisa son vœu. »
Cela est inexact ; saint Paul ayant été martyrisé la 12 e ou la 13 e année
de Néron, sa mort doit être fixée à l'an 65 ou 66; et, comme il était em-
prisonné dès l'automne qui précéda son martyre, il s'ensuit qu'il ne s'é-
coula pas huit années dans cet intervalle, mais deux ou trois années à
peine ; encore faut-il retrancher, de ce court délai, le temps qu'il passa en
Orient où il se rendit immédiatement après sa captivité et dont il ne revint
que pour retomber immédiatement dans les fers. L'autre anachronisme,
non moins grave, concerne l'incendie de Lyon. M. Peladan, d'après la lé-
gende du bonhomme Rubys, attribue ce désastre à la vengeance céleste
irritée contre les Lyonnais qui auraient fermé leurs portes à l'Apôtre. Il
n'y a à cela qu'une difficulté, c'est que saint Paul ayant dû passer à Lyon,
selon M. Peladan, l'an 63, cette ville avait été incendiée la centième année
de sa fondation, soit l'an 59, c'est-à-dire quatre ans avant le prétendu pas-
sage du saint, ce qui doit, ce me semble, nuire quelque peu à la corréla-
tio:i de ces deux événements. Mais M. Peladan est si peu fixé lui-même sur
cette question de chronologie qu'il dit autre part que l'incendie de Lyon
arriva dans les premières années du règne de Néron, attestation conforme
à la date que je donne, ce prince ayant régné de l'an 54 à l'an 68.
   Mais, si l'on veut juger du peu de créance que mérite cette fable, il
suffit de remarquer les autres erreurs qui se trouvent dans les documents