page suivante »
232 BIBLIOGRAPHIE. visiter ce,berceau des dieux dont nos professeurs nous ont tant parlé, de sanctionner, sur le sol même qui produisit tant de grands hommes, l'enthousiasme traditionnel de l'enseignement classique. Ce bonheur a été donné à M. Yemeniz ; son Voyage dans le royaume de Grèce, publié en 1854, est un livre remar- quable qui révéla, chez son jeune auteur, des qualités précieuses et multiples. Nous ne vouions pas en parler ici. Une voix, dont l'autorité est suprême en matière littéraire, l'a fait beaucoup mieux que nous ne saurions le faire nous-même. Qu'on lise, en tête de la première œuvre de M. Yemeniz, les Considérations sur le génie de la Grèce ; elles sont signées d'un nom qui est la plus pure gloire de la poésie contemporaine. Ce prestige de la Grèce, qui ne saurait être effacé ni amoindri par aucun progrès, par aucune lumière nouvelle, cette attraction qu'elle doit exercer éternellement sur les esprits sérieux et éle- vés tiennent à des causes nombreuses et de différents ordres. Qu'on nous permette, après les écrivains d'élite qui les ont étu- diées, de les signaler une fois de plus aux oublieux et aux ingrats de notre temps. La première de toutes ces ciaises, c'est la recon- naissance, pour ainsi dire filiale, vouée par notre intelligence à la mère de la civilisation. La philosophie, la politique et l'art ont hérité de la Grèce leurs grands enseignements ; nous tenons d'elle toutes les richesses de source humaine qui existent dans le domaine intellectuel et moral des sociétés modernes. Aussi les penseurs qui cherchent dans l'antiquité le principe de nos vertus publiques, de nos grandeurs, de nos libertés, se tournent- ils vers ce pays avec amour, en même temps qu'ils maudissent le génie brutal de Rome, étouffant jusques aux idées et aux as- pirations de la Grèce écrasée et proclamant, sur les ruines des temples élevés à la Beauté, la divinité de la Force. En dehors de ces généralités, il est d'autres considérations qui doivent, pour les esprits préoccupés d'intérêts plus positifs et plus actuels, établir l'opportunité de tout livre relatif à la Grèce moderne. Quoi qu'en ait dit Montesquieu, l'empire de Turquie ne saurait subsister indéfiniment ; son écroulement n'est plus re- tardé que par les difficultés inhérentes à la conciliation des pré-