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300 HISTOIRE DU BEAUJOLAIS profité. Il se jeta dans tous les excès familiers à ses pareils. Il donna libre cours à son tempérament violent. Nulle con- sidération ne pouvait l'arrêter. L'omnipotence du seigneur féodal dans ses domaines n'était que trop favorable à l'essor de tous les caprices. Il faut une vertu peu commune pour résister aux séductions de la toute-puissance. Humbert n'eu était guère pourvu. Aussi se jeta-t-il dans tous les ex- trêmes. Il fit le désespoir de ce bon Pierre le Vénérable, dernier ami du père, qui gémissait sur le fils et n'entrevoyait que dans un miracle la possibilité d'une conversion. Le miracle eut lieu. « Rcvelalio de quâ si quis dubitaverit nescio cui jam mi- raculo credere possit. » « Si quelqu'un en doutait , je ne sais à quel miracle il pourrait croire (1). » Dans une guerre « au païs de Forests, » Humbert avait perdu un de ses plus braves chevaliers et de plus son ami, du nom de Geoffroi d'Iden. Deux mois s'étaient écoulés depuis cet événement quand une nuit le défunt apparut au sire de Beaujeu, le supplia de s'abstenir de toute participation à l'expédition que préparait Amé, comte de Savoie, autrement, corps et biens, il perdrait tout. Horrenda visio! dit Severl. Cette apparition jeta le trouble dans l'âme inquiète d'Hum- bert. Il en confia le secret à son ami Guichard de Marzê. L'ami vivant conseilla d'obéir à l'avertissement que d'outre- tombe envoyait l'ami défunt. Mais comment résilier l'enga- gement pris avec Amé de Savoie? Un voyage à la Terre- Sainte tranchait toute difficulté. Il fut résolu. Il ne faut pas sourire de la naïveté de ces hommes de fer. Ils vivaient dans une atmosphère imprégnée de traditions superstitieuses. Tout le moyen âge croyait aux sciences oc- cultes, au diable, à la magie, aux sorciers, etc. Les plus ins- (1) Liber n, De miraculis, cap. xxvn.