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LE CHATEAU DE CAR1LLAN. 55 permettait d'espérer, sans parler des théories de M. Pivalle sur la réciprocité dans l'amour. Je parlai alors à mon père de l'acquisition de Carilian. — J'y consens volontiers , répondit-il. Il te faut bien une distraction et, si tu travailles toujours comme depuis ton retour, le domaine sera payé dans quelques années. Allons le visiter. J'eus soin de faire renvoyer cette excursion jusqu'après le départ de Julien, car nous devions être reçus par Mme Clair- vaux et son mari. Nous trouvâmes en effet, à Carilian, l'idole de notre ami, et je pus m'expliquer sa passion pour elle. Au moment où nous la vîmes, Mllc Gersol joignait aux avantages dont l'avaient dotée la nature et l'éducation, une grâce ac- quise dans l'usage du monde et cet éclat de fraîcheur que le mariage donne à quelques jeunes filles. Rose la dévorait d'un œil curieux et jaloux. — As-tu toujours bon courage ? lui dis-je ensuite, en l'embrassant. — Oh ! oui, bon courage et aussi de l'espoir ! Puis elle se jeta dans les bras de Marguerite, à qui elle avait déjà sans doute conté ses nouveaux chagrins. Tu comprends sans peine comment Marguerite se trouvait là . J'avais représenté à mon père qu'il est imprudent de visiter un immeuble qu'on se propose d'acheter, sans être accompagné du notaire qui vous préserve des surprises. Mon père avait donc invité M. Laval, et cet excellent homme avait dit, en jetant les yeux sur moi : — Au surplus, nous irons en famille. Marguerite aurait peur à la maison en l'absence de nos voisins, tandis qu'elle se fera un grand plaisir de celte partie de campagne. Je me promenais donc entre elle et Rose et souvent avec elle sans Rose, par les jardins et les pièces du château. Je m'extasiais à ses côtés sur la vue de la rivière et de la cam-