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84 LE CHATEAU DE CARILLAN. abandon charmant, d'un ton dont la sincérité et la mélan- colie lui valurent immédiatement le pardon de Rose. Juge combien je fus doucement ému à ces paroles. J'eusse voulu dire encore à Marguerite tous les sentiments qu'elle m'inspirait ; mais la tristesse de Rose me préoccupait et d'ailleurs elle me pria bientôt de me retirer avec elle. Au moment où nous allions nous quitter dans la maison, ma sœur me dit, d'une voix troublée: — Il faut que papa achète Carillan. — Que t'importe ! osai-je encore répondre. Aimes-tu cette résidence, sans la connaître? — Oui, fit-elle bien bas. Puis elle ajouta, en réunissant tout son courage : Il m'importe beaucoup , et à toi plus encore et encore plus à quelque autre. Tu as été au col- lège avec M. Leroy et M. Gersol-, Mu° Gersol a habité Paris pendant que tes amis faisaient leurs études. J'ai tout deviné et je n'aime pas M. Gersol. Pressée par mes questions, Rose m'avoua enfin l'intérêt qu'elle prenait à Julien. Il n'y avait donc plus à douter et elle semblait s'exposer sans crainte aux douloureuses consé- quences de cette affection. J'abordai avec elle ce sujet délicat et lui fis part de mes appréhensions, l'engageant à vaincre ces sentiments, à étouffer une sympathie subite dont j'affectai de méconnaître la gravité. — Il n'est plus temps, me répondit-elle. J'ai bien compris la position ; j'attendrai ! Julien arriva sur ces entrefaites et je le reçus avec un certain embarras. Mais il fui bien accueilli d'autre part. J'observai les sentiments de Rose en sa présence et j'augurai qu'elle l'aimait assez pour mener à bien la périlleuse tâche qu'elle entreprenait. Je souris devant celte heureuse pers- pective, à la réalisation de laquelle mon propre roman me