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                   M. VICTOR DE LAPRADB.                    481

parables douleurs et des espérances immortelles, et, se pro-
duisant enfin comme l'art suprême, puisqu'elle résume en
elle la triple forme de l'art, elle doit se consacrer à parer,
comme on l'a dit, la vérité d'une robe éclatante, à populariser
des idées justes et vraies et des sentiments généreux. Voilà sa
mission : loin de s'enfuir au désert, de s'envoler aux régions
de l'impalpable, ou de remonter le cours des riantes mytho-
logies, elle doit ressembler, pour employer une comparaison
bien connue, à cette horloge placée au sommet d'un édifice,
où le savant et l'ignorant, le riche et le pauvre vont également
demander et savoir l'heure qu'il est; en un mot, M. de
Laprade dit au poète en lui traçant sa route: « Le désert!
voilà ton vrai terrain ; » j'oserai écrire* traçant la route à
mon point de vue:
   Poète ! l'homme et Dieu ! voilà ton vrai terrain.
   Ai-je dit cependant que le poète devait s'interdire de con-
templer la nature et d'en célébrer les ravissants spectacles?
ce serait absurde et barbare. Qui donc, s'il n'a le cœur éteint
ou flétri, pourrait rester froid devant tant de merveilles? La
nature sera toujours une source inépuisable d'inspirations
pour l'artiste, de chants pour le poète, d'admirations pour
(ous. Mais de l'admirer à s'y absorber il y a loin. Dieu qui
est si grand dans ses œuvres ne s'est pas contenté que les
deux et la terre, dans leur langage muet, racontassent sa
gloire; il a donné à un petit nombre d'hommè*s choisis une
voix puissante, mélodieuse, belle, pour la raconter dans un
langage divin, pour redire et faire redire aux autres hommes
la grandeur des ouvrages de ses mains. Là se trouvent, et
l'ordre dans les desseins de sa volonté et l'harmonie dans
l'universel concert ; et toute déviation du plan providentiel
y est une note fausse et un désordre. Est-ce que la nature
sera moins bien louée, est-ce qu'elle s'offrira à nos regards
sous un jour moins riant et moins beau, parce qu'en la cé-
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