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96 VARIÉTÉS. remarquer que l'artiste reproduisait avec une vérité parfaite la chute d'un soldat blessé dans un tableau de David. Au reste, il nous semble que, chez la plupart des artistes parisiens eu renom la propension ù s'occuper du détail, à lui donner de l'importance est évidente.Par ce côté,leur supériorité est incontestable.En province le par- terre paraît tenir davantage à ce qu'on pourrait appeler les qualités de nature: le feu, la passion, l'énergie ; c'est ainsi que, auprès de notre public, la finesse précieuse du jeu de M. Bressan n'a pu faire oublier la faculté de s'émou- voir que possédait Bondois. C'est ainsi que M me Rose-Chéri, si savante dans l'art des inflexions de la voix, si attentive à la mesure et à l'harmonie des mots et des mouvements, n'a obtenu qu'un succès au-dessous de son mérite. Le parterre ne lui tenait même pas compte de l'accent naturel, de la note vraie qu'elle rencontrait si souvent. Qu'il s'agisse de théâtre, de littérature ou de poésie, il y aura toujours des artistes qui viseront de préférence à reproduire la nature dans sa réa- Iit5 nue, et d'autres qui s'attacheront à l'idéaliser. M. Laferrière, malgré ses traversées périlleuses , à travers les océans du mélodrame appartient évidemment à celte dernière catégorie d'artistes. Même à l'Ambigu, c'est un classique; il réussit à imposer des habitudes régulières à la muse des Anicet Bourgeois et des Bouchardy. Aussi, quand par un beau jour, pas- sant de plein saut de l'Ambigu à l'Odéon, il s'est trouvé aux prises avec les solides alexandrins de M. Ponsard, il s'est vaillamment comporté et comme un lutteur de la meilleure école. On a vu tout de suite qu'il était là sur son vrai théâtre et qu'il pouvait y déployer les hautes qualités qui le distinguent, le style qu'il avait appris où d'autres se perdent ; car l'acteur comme l'auteur peut acquérir un style, quoique l'un ne fasse que dire ce que. l'autre écrit. Le style en effet n'est pas autre chose que l'appro priation de certains procédés d'après certaines lois qui les coordonnent, de manière à produire un résultat prévu. Le genre de talent de M. Lai'errièic le prédestine au Théâtre-Français. 11 y aura sa place tôt ou tard. Ce qu'il y a de conventionnel dans la tragédie et la conversation en vers paraît devoir s'allier très-bien à ce qu'il y a d'étudié et d'acquis dans sa manière. L'ampleur de ce monde siéra mieux à l'envergure de ses gesles que la sphère étriquée du vaudeville où doit dominer la muse réaliste. C'est une retraite que nous lui souhaitons et où son talent achèvera de mûrir. .1. M. VARIÉTÉS. — NOTE A PROPOS DES FRESQUES DE M. FRÉNET Dans un article donnépar la Revue sur les travaux exécutés par M. Frénel, dans la crypte d'Ainay, on regrette que le Christ ne soit pas représenté avec la chevelure ondoyante des Nazaréens, type généralement admis par les al- tistes depuis l'époque gothique ; on nous fait observer à ce sujet que l'artiste n'a pas été entièrement libre dans son choix ; la crypte étant romane comm<° toutes les cryptes, M. Frénel a dû suivre les données artistiques romaines. Toutes les peintures des catacombes représentent le Christ et les apôtres en cheveux courts et on eut peut-être été plus en droit de blâmer l'artiste s'il n'eût pas mis sa peinture d'accord avec l'esprit et le style du monu- ment qu'il était chargé de décorer. A. V. AIMÉ VINGTIUNIEU, directeur-gérant.