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                 LE VEAU D'OR.                    369
S'il ne fait pas gronder son terrible tonnerre,
Cependant trop souvent les puissants de la terre,
Courbés à deux genoux devant son coffre-fort,
Implorent pour le leur un tout petit renfort.
Caligula parfois menaçait.l'auréole
Qui brillait sur le front du dieu du Capitole,
Et, de l'avis de tous, l'hôte du Palatin
Préparait pour lui-même un dangereux destin.
C'est ainsi qu'aujourd'hui, dans notre bonne France,
La foule, révérant les dieux de lajfinance,
Naguère regardait comme une énormité
De donner une atteinte à leur autorité :
Le Jupiter veau d'or, dans le fond de sa caisse,
A son gré renfermait ou la hausse ou la baisse.
On a craint pour l'état, quand Napoléon trois,
De la vieille routine abandonnant les lois,
Dédaignait les écus de Rotschild et des autres,
 Et nous sollicitait de lui prêter les nôtres.

Rassurez-vous, Messieurs, votre part du gâteau
Est encore assez grande, et le nombreux troupeau
De jobards et de sots, dont vous tondez la laine,
Vous fournira longtemps mainte excellente aubaine.
La science d'ailleurs, pour prendre le poisson,
Invente chaque jour un nouvel hameçon.
Elle vous a dotés du bavard électrique,
Esclave obéissant à donner la réplique,
Et qui de mille riens composant un salmi,
Fait osciller le trois ou le quatre et demi.
Son génie inventa le célèbre Tartare,
Qui, pour Sébastopol, fit sonner la fanfare.
Le tour fut bien joué ; point de Sébastopol,
Mais les plumes des sots avaient jonché le sol.
De la laine d'autrui la conquête facile
Dans votre large poche élira domicile ;
Et, sans apprendre rien, le malheureux mouton
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