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                    M. VICTOR DE LAPRADE.                     478

Turquéty, Reboul, d'autres que j'oublie sans doute, mais au-
dessus de tous M. de Laprade. — Et qu'on me pardonne ici
un retour d'égoïsme local ! il y a eu contre la littérature , à
notre époque, quelque chose comme une invasion des Bar-
bares de l'intérieur : les Lettres auraient pu périr ; et, au pre-
mier rang des hommes généreux dont les exemples et les écrits
ont empoché ce détestable suicide de s'accomplir, nous Lyon-
nais, nous nommons avec orgueil deux écrivains, deux Lyon-
nais, M. de Laprade, Ozanam. —Ozanam ! C'est la première
fois que ce nom bien-aimé se rencontre sous ma plume : je
devais consacrer ce que j'ai de loisirs à faire connaître sa vie,
à glorifier sa sainte mémoire; une plume meilleure et plus
digne en prendra soin; mais je ne m'éloignerai pas de cette
tombe vénérée sans y déposer l'hommage d'une inexprimable
affection que rien n'effacera, et sans saluer le grand homme
et le saint dans celui qui fut pour beaucoup d'entre nous le
meilleur, le plus dévoué des amis !
   M. de Laprade, prenant le contre-pied des habitudes de
notre siècle, a compris de bonne heure que l'inspiration n'é-
tait que la moitié du génie, et qu'il fallait demander l'autre
part au travail. Cette conviction a seule, dans tous les temps,
produit les Å“uvres durables et les noms glorieux. M. de La-
prade a travaillé, et avec une conscience , un respect de lui-
même et du public , une persévérance que bien peu d'écri-
 vains, à notre époque, ont égalés. Je me rappelle parfaite-
ment qu'en 1834 un de mes amis vint me lire une pièce de
vers sur un sujet fort célébré alors, mais incontestablement
supérieure à tout ce que le même lexle avait inspiré. Cette
pièce, qui m'avait vivement frappé était de notre poète, qui
 ne l'a pas jugée digne d'être imprimée , et ce n'est qu'en
 1839, après cinq ans de travail et d'efforts ininterrompus
 que M. de Laprade, déjà poète distingué en 1S34, a fait pa-
 raître sa première publication. Je ne m'étonne pas de la per-