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478                M. VICTOR DE LAPRADE.

critique bienveillante sans partialité, sévère sans injustice,
hésitait a faire entendre sa voix.
   Le défaut que j'indique appartient moins au poète qu'au
genre qu'il à choisi. Toutes ces œuvres qu'enveloppe le sym-
bolisme ont le malheur, quelle que soit la valeur de la forme,
de nous laisser froids et insensibles: comment se passionner
pour un symbole? Psyché ravit l'imagination et enchante
l'oreille; elle n'émeut pas: ses larmes ne nous font pas
pleurer; on senl trop que, sous cette enveloppe aérienne et
gracieuse, la vie ne palpite pas. Nous traversons ainsi trois
chants d'un poème sans émotions; et il faut tout le talent de
l'auteur, tout le charme qu'éprouvent les esprits sérieux à
voir une austère pensée de Cosmogonie morale se dévelop-
per à travers les splendeurs d'une poésie magnifique pour
que la lecture du livre n'amène pas quelque lassitude. Je ne
conseillerais à personne, et pas même à M. de Laprade de re-
nouveler l'épreuve. La poésie, entre tant d'attributs divers
qu'on lui assigne, est bien un peu l'art d'émouvoir ; et l'idéal
suprême qu'elle poursuit, elle ne l'atteint, à mon sens, qu'au
point de conjonction de l'idée avec le sentiment. — Voilà
pourquoi je verrais avec bonheur M. de Laprade sacrifier
moins au symbolisme, à l'amour excessif de la nature, à
l'odi profanum vulgus, pour se placer dans un ordre d'idées
plus rapproché du cœur de l'homme, plus humain, si je puis
ainsi parler, plus en rapport avec la haute et sublime mission
qu'il a reçue d'en haut; et j'ai besoin d'expliquer ici toute ma
pensée, en avançant un peu dans l'examen de ses œuvres
et en montrant à quel écueil il a un moment touché, pour
avoir trop facilement présenté sa voile au vent qui l'y
poussait.
   Dans les Odes et Poèmes qui viennent après Psyché, où le
talent poétique reste le môme, et qui abondent en strophes
vaillantes el bien frappées, quelques défaillances intermit-