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MO                          M. RENARD.
 consacra deux années de sa vie à applanir un ré rebelle. Amis
riaient, chiens hurlaient, voisins décampaient..., mais le ré de
 meura maître du champ de bataille ; et comme le lui dit un de ces
mauvais plaisants, toujours disposés à railler les choses les plus
graves , nous pûmes applaudir son entrée •— (sonnant ré) —
en triomphe, sur notre première scène lyrique.
   Signalerons-nous enfin à M. Renard quelques négligences,
un laisser aller vocal qui lui fait chanter mollement ou phraser
sans charme certains passages qu'il pourrait enlever, à l'applau-
dissement général ? Ceci est, avant tout, affaire d'initiation et
d'exemple. Ou nous nous trompons fort, ou M. Renard, jus-
qu'ici, a plutôt fréquenté les professeurs que les grands mo-
dèles. Qu'il pût suivre, une saison seulement, les chanteurs de
la bonne école : Mario, dans ce qui lui reste -, Bettini, dans ses
émissions modérées (le premier duo de la Lucia, par exemple,
ainsi que le récitatif de la scène des tombeaux); Caizolari, en
tout et partout : et nous le retrouverions doué de cette faculté
chantante qui répand jusque sur le moindre fragment, haché
par l'école française, ce charme expressif dont l'Italie ne de-
mande qu'à lui dire le secret.
   Car c'est vers le chant italien, — et dussions-nous, hélas ! le
voir suivre ce conseil, il nous échappe, malgré nous, — que la
belle organisation vocale de notre ténor l'entraîne irrésistible-
ment. Là il trouverait la pleine expansion de ses facultés ; là bien-
tôt seraient ses attractions ; là semblent poindre, dans l'avenir,
ses vrais triomphes. J'en atteste l'intelligente et parfaite aisance
avec laquelle il a abordé le rôle d'Edgard. J'en atteste, — mais
en y joignant mes félicitations les plus sincères, — l'insuccès
prévu qu'il a recueilli dans ce cahos de demi-phrases entrecou-
pées dont le systématique agencement constitue le rôle de Jean
de Leyde
   En envoyant M. Renard faire son tour d'Italie, je sacrifiais
volontiers mes intérêts aux siens ; mais j'avais oublié la chaude
sympathie qu'il a su, d'emblée, conquérir parmi notre public si
froid d'habitude. Notons le fait, non comme un vain prétexte à
compliments, mais parce que c'est là encore un des traits ca-