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                  LA LONGÉVITÉ.                       99
Le bœuf, sans le boucher, pourrait vivre vingt ans,
Sans le chasseur, le cerf ruminer plus longtemps ;
Des jours de l'animal vous supputez la somme :
Soit: mais je me refuse à quinhipler pour l'homme,
Et j'annule d'un mot votre comparaison :
Le cerf a son instinct, je n'ai que ma raison.


L'homme, nous dit Flourens, ne meurt pas : Use tue!
Avant lui, par Buffon, venté reconnue.
Dès longtemps je médite un mémoire, un traité
Sur la carrière humaine et sa brièveté :
Ma plume eût pu noircir de prose un gros volume :
En deux feuillets de vers ma Muse se résume.


Oh* que la vie est courte ! et nous le savons tous.
« Mais de votre plein gré pourquoi l'abrégez-vous ?
« Dit l'éloquent docteur dont la voix nous gourmande,
« Pourquoi résistez-vous quand la raison commande ?
« Aux penchants vertueux pourquoi fermer l'accès ?
« Livrer votre existence au vice, à ses excès ?
« D'une brève carrière abrégeant la durée,
« Pourquoi recherchez-vous sa fin prématurée? »


Tes pourquoi, dit le Dieu, ne finiraient jamais :
La réponse est facile : en trois mots, je la fais :
Parce que je suis homme : homme, et c'est à ce titre
Que j'exerce sur moi la loi du libre arbitre :
L'indulgente nature en priva l'animal :
Je puis monter au bien, je veux descendre au mal ;
C'est mon droit ; deux penchants combattent dans mon
                                                    [âme,
L'un défend à mes vœux ce que l'autre en réclame ;
Là, le désir ardent d'atteindre à de longs jours;
Là, le penchant fatal d'en abréger le cours ;