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526 NÉCROLOGIE. leur Diday, secrétaire-général de la Société de médecine , s'est exprimé sur la tombe entr'ouvertc de ce maître regretté : *En présence de ces tristes dépouilles, j'ai du moins la consolation d'ap- porter à celui qui nous est enlevé le tribut le plus cher à son cœur. Ne dois-je pas , en effet, me croire l'interprète de tons ses amis , puisque je parle au nom de la Société de Médecine? C'est là qu'il aimailà trouver réunisses confrères, ses collègues, des hôpitaux, de l'école, des œuvres de bienfaisance; là son âme était appréciée ; là le vide qu'il laisse est senti ; là son souvenir sera conservé ! Que vous dirai-je, Messieurs, de l'ami que nous perdons, que vous dirai-je que chacun de vous ne sente , en ardente sympathie , en navrants regrets, mille fois plus fortement que je ne le saurais exprimer? Montain n'est pas de ces hommes pour qu% l'éloge académique soit nécessaire. Qu'on s'attache à signaler les vertus de celui qui, dans sa carrière, ne s'éleva jamais au-dessus de la limite du devoir : je comprends, j'approuve ce dernier épanchement, cette sorte de besoin d'exagérer le mérite pour justifier les regrets. Mais Montain peut nous dispenser de pareils hommages. La stricte vérité sera son plus beau panégyrique ; et notre douleur a de trop légitimes motifs pour chercher un aliment dans l'hyperbole. Fils de ses œuvres, fils du concours, Montain se montra toute sa vie re- connaissant et fier du secours que cette belle inslitutiou, celte institution qui grandit et s'étend à Isyon tandis qu'on la restreint ailleurs, avait prêté à son élévation. Le majorât était son idole; à l'entendre, lui si bon, si modeste, s'enivrer du souvenir de ses succès passés, on éprouvait d'abord une espèce d'étonnement qui, en le connaissant mieux, ne lardait pas à se convertir en profonde et sincère estime. Se glorifier ainsi n'était-ce pas, avant tout, honorer le travail? N'était-ce pas prêcher d'exemple que de montrer par là jusqu'où peut conduire , et sans autre appui, l'amour de l'étude, l'ambition du progrès et la religieuse conservation de l'esprit scientifique au milieu des absorbantes préoccupations de la clientèle? Telles sont, en effet, les habitudes auxquelles Montain demeura toujours et partout fidèle. A l'hôpital, dans sa chaire, à nos réunions, la régularité la plus assidue, la tendance au positivisme, l'ingéniosité des idées, le tour at- trayant, le sens lumineux qu'il donnait aux conceptions les plus abstraites, tout dénotait l'homme accoutumé à parler cfair parce qu'il pensait juste. Tout , hélas ! montrait et nous fait regretter en lui un reste de celte race dont Lyon s'honore, l'un de ces vieux majors qui savaient vouer au service de l'humanité leurs forces tout entières sans restriction ni parlage,l'un de ces héros de la chirurgie , que nous trouvons , qu'il me soit permis de le dire , bien dur d'avoir à remplacer aujourd'hui. « Clinicien, professeur, écrivain, praticien, je n'essaierai pas de vous pein- dre le rôle éclatant que Montain remplit , sous ces divers titres, pendant une époque semée d'agitations de toute sorte , où son courage fut à la hau- teur des plus nobles sacrifices. Mais ce qu'il ne faut pas omettre près d'une tombe, ce qui sera l'éternel honneur de sa mémoire, la consolation toujours présente aux cœurs qui le pleurent, c'est que nul mieux que lui, je me trompe, nul aussi bien que lui ne sut faire profiter les pauvres des fruits de son expérience. De toutes ses chères habitudes de la vie d'hôpital, la con- sultation gratuite fut celle dont il lui eût été le plus cruel de se départir. 11 ne put y renoncer et ouvrit deux fois par semaine aux malheureux sou cabinet, que j'ai bien souvent vu moi-même regorgeant de cette affluence si précieuse à son âme compalissante. Que de larmes taries, que de bien- faits ignorés, dans ces louchants tête à tête de la misère et du talent le plus généreux! Ils pleurent , eux aussi sans doute, en ce moment, leur pro_