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BULLETIN BIBLIOGRAPHIQUE. 43ô se servent désormais, pour écrire, que de quelque suave plume ar- rachée aux ailes des anges.... Mais la religion, quelque reconnais- sante qu'elle puisse être de ce touchant hommage, n'est-elle pas en droit d'exiger, de ceux qui le lui rendent, cette même douceur si vivement recommandée par eux? Enfin, n'accordera-t-ondésor- mais de brevet de tolérance qu'aux hommes qui, confondant dans un même culte Jésus-Christ, Socrate et Platon, nous pré- senteraient volontiers pour modèles ces excellents empereurs ro- mains dont la prudente impartialité réunissait dans un même temple les images de J . - C , de Vénus et de Jupiter. Oh! ces hommes-là vraiment, nous en convenons, n'étaient pas hommes départi M. Tisseur finit en reprochant à M. de Laprade d'avoir jusqu'ici trop pleuré, trop gémi ; même en admettant que les accents du poète aient toujours eu quelque chose de plaintif, nous ne sau- rions le lui reprocher •. non seulement la poésie de la douleur est la plus morale, parce que l'homme y puise des enseignements qu'il ne saurait trouver ailleurs, mais c'est encore la seule vraie, car l'expression de la douleur est, pour ainsi dire, celle de la vie elle-même ; les premières poésies (nous entendons premières en sublimité comme en date) parurent, au début du monde, char- gées de toutes les misères et les plaintes des générations futures ; elles furent assez, lamentables pour servir de symbole et de type à tous les gémissements qui s'élevèrent dans la suite des siècles. Job sur un fumier, David sous le cilice ; ces deux poètes assez renommés, et méritant quelque peu de l'être, n'ont eu, il est vrai, aucun trait de ressemblance avec les gais chansonniers qu'on est convenu de nos jours de regarder comme de grands poètes ; ils n'ont pas été, nous en convenons, les précurseurs de M. Alfred de Musset et autres du même genre ; mais nous n'avons jamais songé à déplorer que M. de Laprade n'appartint pas à cette école ; ajoutons encore que, comme fait, nous n'ad- mettons pas le reproche de M. Tisseur. La poésie de M. de Laprade, dans les Odes et poèmes, est grave, sérieuse, philoso- phique , mais elle n'est pas gémissante. 11 suffit aussi de pro- noncer le nom d'Hermia pour rappeler à ceux qui ont lu les