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334 VICTOR DE LAPRADE. fréquent usage de ces réminiscences, de ces évocations; un des grands attraits des sermons du père Lacordaire réside préci- sément dans ce mélange singulier du sacré et du profane. Le célèbre Dominicain aime à s'entourer , on le sail, des ombres de Brulus , de Miltiade, de Socrate, qu'il cite à tout moment, comme si les saints du Paradis ne lui suffisaient pas. Mais si ce procédé est quelquefois d'un goût contestable dans une chaire chrétienne , peut-être que , discrètement employé dans quelques poèmes évangéliques , il eût ajouté à leur variété et à leur grandeur, et répandu de l'intérêt sur l'œuvre entière. Je ne donne cette observation, du reste, que pour ce qu'elle vaut, car je sais bien que la critique n'a pas le droit de substituer sa pensée à celle de l'auteur. Et de plus il y a , dans la manière de M. de Laprade , quelque chose de simple et de sévère , qui répugne peut-être aux moyens que j'indique. Ses poèmes ne sont pas des drames, mais des méditations. Ils commencent ordinairement par une sorte de récitatif qui contient en germe le thème principal, puis le poète reprend ce thème et le développe sans tomber dans la recherche des détails. C'est ainsi qu'il reste sobre, tout en paraissant long quelquefois. lues Saintes Femmes pourraient être comparées à une fresque peinte par Overbeck , d'un ton pâle, mais pleine de tendresse et d'onction , et d'une grande pureté de lignes. C'est encore la femme qui est exaltée dans ce poème , la femme qui sou- tient le prophète dans ses épreuves et à laquelle Dieu accorde ses plus grandes faveurs. Dans le Précurseur , et sons ce titre je comprends, avec le poème de ce nom , le Royaume du monde et le Baptême au désert, le poète se retrouve en face de la nature , en face du désert, ce berceau des visions, comme il l'appelle : Trépied toujours fuman! des inspirations , Bûcher où pour mourir , en nous cachant ses (races