page suivante »
ÉTUDE SUR BLAISE PASCAL. 271 ment constituée, que rien ni du dehors ni du dedans ne vînt troubler son travail de perfectionnement pour arrêter sa forme et son génie. Les découvertes, les réformes, les révolutions, les guerres de religion, les guerres civiles avaient labouré en tout sens les es- prits, remué profondément les imaginations, et créé une foule de pensées et d'ambitions nouvelles qui, oisives etmalréglées,étaient un danger, mais qui aussi étaient une force, si on savait les diriger. Heureusement la société se trouvait en état de le faire. Le ca- tholicisme resserré , mais instruit par ses défaites, n'en deve- nait que plus solide et plus respecté. L'ordre politique, qui eût dû périr dans les déchirements, semblait plus ferme qu'aupara- vant. L'autorité religieuse et l'autorité civile unies par les évé- nements, débarrassées de tous les obstacles, pouvaient désor- mais imprimer autour d'elles une impulsion une et vigoureuse. A leur voix, les éléments épars allaient se rassembler, les for- ces incohérentes s'ordonner, un mouvement régulier entraîner l'administration, l'industrie, le commerce, les lettres et les arts, toute chose être créée ou renouvelée, le XVIIe siècle com- mençait. Dans ce travail glorieux, Pascal devait avoir plus d'un rôle. Non seulement il possédait tout ce qui constitue la supériorité de l'esprit, vigueur, rectitude, élévation, profondeur, mais Dieu, pour qu'il suffît à plusieurs tâches, avait pétri cet esprit de ma- tières diverses, et même opposées , imagination et calcul, ob- servation et rêverie , ironie et enthousiasme, finesse et force, simplicité et pénétration, docilité et hauteur. Toutes ces dispo- sitions ne s'éveillèrent pas à la fois, mais successivement, à mesure que les événements du dehors vinrent les solliciter. Chacune d'elles eut peu de place dans cette vie si courte, mais aucune ne fut étouffée, sinon au moment nécessaire, et pour permettre aux autres de se produire. La vie de Pascal commence par deux circonstances heureuses et de bon augure : il a pour père un homme riche , considéré, pieux et savant, un père tel qu'il en faut aux hommes supé- rieurs, savant pour pouvoir diriger l'éducation de son fils, pieux