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12                     GÉRARD DE ROUSSILLON.
un vassal. Il relevait cependant de Charles-Martel ou de Charles-
le-Chauve, car les textes ne sont point d'accord sur le nom. Cette
question nous semble très-secondaire au point de vue du roman,
puisque tout y révèle des idées et des mœurs contemporaines
de l'époque de sa composition, c'est-à-dire du XIIe siècle.
    Quoi qu'il en soit, une rupture éclate entre le suzerain jaloux
et l'orgueilleux vassal. A la suite d'une lutte de plusieurs an-
nées, remplie de combats et de négociations, mêlée de succès
et de revers, Gérard finit par succomber. Il est défait à la ba-
taille de Val Béton, et c'est en vain qu'il cherche un asile dans
son imprenable château de Roussillon, livré au roi par un traître.
Proscrit, fugitif, il perd son cheval et jusqu'à son épée. Le ro-
mancier pousse l'effet des contrastes au point de montrer le
puissant baron réduit à exercer pour vivre le métier de charbon-
nier (1). Une lui laisse pour toute consolation que le courage et
le dévouaient de Berthe, sa femme, dont le roman et l'histoire
se sont disputés le noble caractère. Enfin, un retour de fortune
 permet à Gérard de recouvrer une partie de ses anciennes pos-
 sessions et de rentrer dans son bon château de Roussillon, où il
meurt paisiblement, pendant un instant de trêve que lui ac-
corde son implacable adversaire.
    Le château de Bourgogne, auquel Gérard doit le surnom que
 lui donnent les trouvères, car, de son temps, les surnoms ou
noms de famille n'étaient pas encore en usage, le château de
Roussillon était en effet situé sur le Mont Lassois, entre Châ-
 tillon-sur-Seine et Mussi-l'Éyèque. On y voyait encore, au
 XIIIe siècle, des restes de murailles et de tranchées qui témoi-
               (I)          Girard fu desconfis ,
                     Et tantes fois sourpris de guerres
                     K'il en pierdi toute sa liere ,
                     Et furent si parent ocis ,
                     Et il en wida le pais ;
                     Si se gari com karbonniers
                     Li Dus, ki tant ot esté fiers.
(Chronique rimee de Philippe, Mouskes, écrivain du XIIIe siècle, Bruxelles,
1836, m-4°, )). 75).