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S89 des figures qui n'ont rien de grimacé, en leur prêtant un langage qui est le langage ordinaire de l'homme, et en vivifiant tout cela par une morale pénétrante, douce, fa- cile, point sourcilleuse ni dogmatique. Eh ! bien, cet art, M. Sandeau en connaît les secrets, et ils lui semblent très familiers, tant il y a d'aisance dans son œuvre principale, Marianna. C'était déjà , comme style, du moins, un beau livre que Madame de Sommerville ; l'auteur s'est reposé après un premier succès ; il a repris haleine avant de rentrer dans la carrière, et Ton voit, à la sage réserve de sa marche, qu'il y a eu méditation calme et posée. Le public, celui même des romans, tient bon compte de cette conscience dans les œuvres d'esprit, et Fauteur finit par trouver dans des succès honorables la légitime récompense de ses travaux, tandis que les livres conçus à la hâte, en- fantés précocement, portent assez souvent la peine de leur trop subite apparition dans le monde. Marianna, dit-on, est le portrait plus ou moins réel, plus ou moins idéal d'une femme que M. Sandeau pouvait peindre fidèlement, si telle était son intention. En tout état de cause, le lecteur jugera. Le roman s'ouvre tout à coup par une rupture éclatante, où se brise une vieille et ardente passion, qui, dans le tumulte et la brusquerie des adieux, sait garder toutefois une dignité douloureuse et résignée. Un] jeune homme, à qui sont inconnus encore les orages de la vie, Henri F e l - quères, assiste à cette brusque séparation, à cette fin d'un amour dont il fut quelque temps le témoin, envieux peut- être, et il ne se doute point que cette femne ainsi repoussée viendra mêler son existence dans son existence, à lui, et en troubler les flots, jusque-là si limpides et si purs. La