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194 ment j'ai su qu'il fut un temps où la société de Sainl-Etieimê en était réellement une et que le cœur d'Aimé De Loy l'y retenait. Il avait d'ailleurs dans le caractère quelque chose de mystérieux et de sombre, qui le disposait à ne pas souffrir sous un ciel habituellement triste et en vue du paysage aride des environs de la ville. Saint-Étienne est entouré de montagnes sans arbres, sans culture. La fumée qui s'élève épaisse et noire des feux de charbon, des usines, des ateliers de forgerons, forme au-des- sus de ces montagnes et des rues, un rideau que le soleil a peine a traverser. La ville divisée en deux parties bien mar- quées, l'ancienne et la nouvelle, est cependant sans carac- tère. La première partie n'est qu'un amas de maisons pau- vres horriblement noircies, habitées par des familles miséra- bles, d'une saleté hideuse. L'autre partie se compose d'une rue principale percée du Nord au Midi, traversant la ville dans toute sa longueur et faisant route du Puy à Montbri- son. Les autres rues également percées en ligne droite cou- pent celle-ci de distance en distance et perpendiculairement. Cette régularité sans grâce offre pour la localité un inconvé- nient immense ; les vents presque toujours violents dans les montagnes s'engouffrent dans ces longues percées et soulè- vent en tourbillons une poussière noire qu'ils jettent à la face des passants ; cette poussière forme croûte sur la peau j, on ne l'enlève jamais complètement dans le pays, et, quand on le quitte, on ne reprend sa couleur naturelle qu'après de nombreuses ablutions. Pendant l'hiver la poussière ne voltige plus, elle se change en boue, dont aucune boue ne peut donner l'idée; elle est noire comme l'encre et fait tache sur tout ce qu'elle atteint. Je ne sais si cette poussière etë cette boue en sont la cause, je le présume. On ne voit pres- que jamais de femmes dans les rues ( pour être compris des Sléphanois, je devrais dire : jamais de dames). Celles qui