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L'amour trahi, le ciel perdu,
Et payer les bouffons, les vins, les courtisanes
Avec le prix de Dieu vendu !
Vieux artistes du temple, hommes ravis en gloire,
Qui, jadis pauvres et cachés,
N'aviez d'autre souci que travailler et croire,
Trente ans sur une œuvre penchés !
Maîtres, maudissez-nous ! on pille sans mystère
Les vases, les trépieds, l'autel,
Et l'on met à l'encan les voix du sanctuaire,
Et le Kinnor, et le Nebel !
On dresse sur l'étal la chair des hécatombes ;
L'arche est ouverte sans remords;
On y vole la manne, on fouille dans les tombes
Pour exploiter les os des morts !
On arrache l'ivoire et l'or pur de la lyre,
Et l'on jette le reste au feu !
0 temple, qu'a-t-on fait de tes blocs de porphyre
D'où l'on gratte le nom de Dieu?
On t'a prostitué ! L'esprit d'en haut te quitte,
Le lucre est l'idéal nouveau;
À peine en ce moment quelque rare lévite
Offre un culte pur au vrai beau !
0 honte !... ô prends le fouet, frappe, écrase l'impie,
Brise à grands coups son crâne épais,
Ton courroux fait ta gloire, et Dieu le sanctifie,
Homme d'amour, homme de paix !