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S89 à tous, car leur erreur est la môme , le poêle a répondu ; « Dans tous les monuments achevés du genre humain on trouve un sentiment de critique qui exclut l'ingénuité de la foi, Aproprement parler, l'art lui-même ne commence à exister qu'à la condition de se séparer du culte et de la liturgie. Le prêtre crée les symboles, l'artiste les détruit. L'orient sacer- dotal a fait les Dieux, la Grèce impie a fait les statues. Qu'est- ce que la prétendue orthodoxie de Dante si ce n'est un perpé- tuel blasphème contre la papauté ? Quoi de plus! le siècle de Léon X est le siècle de Luther. » « Aux époques religieuses par excellence appartiennent les sphynx de Thèbes, saint Jérôme, ï e r t u l l i e n , saint Hilaire, les hymnes elles proses ecclésiastiques, les mystères, les crucifix, de Cimabué. Aux époques où naît le scepticisme appar- tiennent les marbres du Parlhénon, l'Antinous, Michel-Ange, R a p h a ë l , Arioste, Shakspeare, Milton, Cervantes, Pascal, Molière^ Racine, Lafontaine, Yoltaire. De quel côté sont les croyants, de quel côté sont les artistes ? » « Ne confondez donc plus la religion et l'art si vous ne vou- lez les détruire l'un et l'autre et l'un par l'autre. On demande aujourd'hui à l'artiste d'être prêtre, c'est-à -dire de n'être ni prêlre ni artiste. Quant au poète, il ne lui est plus permis de rimer un couplet sans affirmer quelle est sa foi en matière d'ontologie, ce qu'il affirme touchant l'origine de la terre et du soleil, de la mer et des étoiles, du travail et du salaire d'Ozinuzdet d'Ahruisan, profondeur fausse et décevante, mère de frivolité et d'impiété réelles. » Toutes ces questions sont envisagées par l'auteur d'Allema- gne et Italie avec cet esprit large et indépendant, il les juge de ce point de vue élevé où les vérités qui semblent contradic- toires au vulgaire se concilient aux yeux du penseur. La dis- corde n'existe dans le monde inoral qu'aux yeux de ceux qui observent mal et avec un esprit prévenu. M. Quinet est déga- gé de toute opinion exclusive, et nulle aveugle prédilection ne trouble son jugement ; la connaissance parfaite de la