Revue du Lyonnais » série 1 - n°9 ( 1839 ) » pp.240B

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 Pécheurs et des Moissonneurs, le peintre est l'homme de loua
 les temps, et ces deux morts n'eurent pas d'arrière pensée ;
 Nourrit, tragédien et chanteur, c'est-à-dire l'homme de la re-
 présentation et de l'actualité, ne pouvait léguer son génie à
 la postérité ; son héritage, à lui, était tout dans un souvenir ;
 il a écrit ce souvenir avec du sang pour le laisser ineffaçable
 sur sa tombe.
    Profond orgueil de l'art ! Épouvantable soif de gloire !
    Dans un siècle où tout se dissout par le suicide, à Dieu ne
 plaise que réservant nos froides colères pour les morts obs-
 curs , nous présentions ici l'apologie de la résolution dernière
 de Nourrit. Nous n'approuverons point cette grande faiblesse
 de l'homme qui ne voulut emprunter à la vie que ses splen-
 deurs et ne craignit pas de se dérober à ses misères , nous ne
préconiserons point un doute insultant pour l'humanité, et
une injure à Dieu. Mais lorsqu'on se presse autour d'un cada-
vre ramassé dans la rue, on essuie d'abord le sang de ses bles-
 sures, on interroge la profondeur de ses plaies, on s'émeut de
pitié , on se demande les causes du malheur, on laisse parler
d'abord les regrets, la voix de la raison se fait entendre
plus tard.
    Eh bien ! donc, écoutez : Ce corps noyé dans une mare de
sang, ce cadavre écrasé sur les dalles de Naples , cette masse
inanimée , cet homme maintenant sans expression et sans
formes, cet homme fut Nourrit... Nourrit! l'une des gloires les
plus populaires de la France , l'idole d'une nation, l'apôtre
des nobles passions et des vertus civiques ; ce front brisé, que
vous soulevez en vos mains, a plié sous le poids des couronnes,
et toutes les grandeurs s'adaptèrent à celle taille maintenant
couchée à vos pieds. D'où vient qu'au milieu de l'harmonieux
silence de vos nuits d'Italie, Nourrit est venu chercher un fu-
nèbre repos si loin de sa patrie, si loin de tous ses regrets, de
tous ses désirs , de tout ce qui lui fut cher ? Hélas ! c'est une
bien triste histoire que lui seul eut pu vous dire dans tous se*
dramatiques épisodes , et, pour la comprendre, nous devons