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 Nous remercions M. Chancel de nous avoir procuré ce plaisir,
 en nous choisissant pour parler de son livre.
    Quelque soit le préjugé poétique auquel on obéit, l'on
rendra justice au talent simple et vrai de M. Chancel; ce n'est
ni l'emphase de la diction, ni les effets forcés qu'on reproche
souvent à la jeune école, ni la pâle correction, ni les raides
allures de son aînée. C'est de la vérité littéraire, c'est-à-dire
ce rapport exact, cette juste proportion entre l'expression et
l'idée qui fait que jamais l'une ne dépasse la portée de l'autre.
M. Chancel n'est pas de ces gens qui se croient profonds,
alors qu'ils ne sont qu'inintelligibles. Nous insistons sur cette
manière pleine de sens et de goût qui nous semble rare au-
jourd'hui parmi les jeunes poètes; nous lui reprocherons seu-
lement de ne pas avoir été assez sévère pour quelques ex-
pressions telle que celle qui se trouve dans la pièce intitu-
lée : Lassitude.
        Alors dans le passé nous cherchions quelques rêves
        Edulcorés d'amour

  En revanche, nous citerons quelques morceaux qui nous
semblent irréprochables , tels que ceux : A mon père, action
de grâce, et surtout Souvenirs d'enfance. Nos lecteurs nous
sauront gré d'en transcrire les vers suivants :

                           A MON FRÈRE.

            Frère ! pauvre proscrit, qu'un politique orage
            A jeté sans abri sur l'helvétique plage,
            Quand le canon d'avril fouettait au loin les airs,
            Ton regard inquiet cherche-t-il vers la France
                 Les champs où notre adolescence
            Fit scintiller le feu de ses premiers éclairs?

            A la chute du jour, quand tressaille la feuille,
            As-tu de ces instants où ton cœur se recueille,
            Et vers ses premiers ans se plaît à revenir?
            Puis, si quelque beau rêve, ou d'amour ou de gloire,